vendredi, mars 17, 2017

François Fillon va traîner sa mise en examen comme un boulet

Dernière modification : 15/03/2017

La mise en examen de François Fillon, mardi, n'est pas une surprise mais acte la tournure hors norme que prend la campagne présidentielle. Le politologue Philippe Breton dénonce un "désastre moral" pour la France.

"Je suis innocent, ma femme a travaillé avec moi pendant des années, comme c'est le cas de centaines et de centaines de parlementaires, dans le passé et en ce moment même", a déclaré, mercredi 15 mars, François Fillon, au lendemain de sa mise en examen dans le cadre de l'enquête sur les emplois présumés fictifs, dont sa famille aurait bénéficié. "Ce calendrier diabolique [...] me délivre de l'engagement que j'avais pris de ne pas être candidat si j'étais mis en examen", considère l'ancien Premier ministre.
Interrogé par France 24, Philippe Breton, politologue et professeur à l’université de Strasbourg, revient sur les conséquences de ce nouveau rebondissement dans la campagne présidentielle. 
France 24 : Comment réagiront les électeurs de François Fillon à sa mise en examen ? 
Philippe Breton : Cela ne va strictement rien changer pour le noyau dur de ses électeurs, qui sont estimés à environ 18 %. Pour eux, ce nouvel épisode n'est que la confirmation de l'existence d'un complot, de la poursuite de cette chasse à l’homme. Ils restent persuadés qu'il est le bon capitaine du bateau pour affronter la tempête. En revanche, François Fillon a besoin de progresser dans les sondages, de gagner au moins 5 %. Cet objectif semble très difficile à atteindre, cela s'apparente à une ascension de l’Himalaya sans air car cette mise en examen, qu'il va traîner comme un boulet pendant les quarante prochains jours, va le priver de cet oxygène politique. 
Quelle stratégie peut adopter le candidat Les Républicains pour récupérer des électeurs ?
François Fillon tente une stratégie qui est, à mon sens, la seule possible : elle consiste à focaliser la campagne sur le programme plutôt que sur le candidat. Le parti va devoir placer les idées au-dessus du candidat. Sauf que nous savons bien, que durant les campagnes présidentielles, l’homme joue un rôle très déterminant. Je crains que les Français aient du mal à détourner le regard de lui.
François Fillon avait promis qu’il ne se présenterait pas s’il était mis en examen. Quand un candidat revient sur une parole importante, quel peut être l'impact sur la vie politique ?
On peut se demander si on n’est pas à l’aube d’un désastre moral. La France est en train montrer que dans une élection présidentielle, on peut disjoindre la politique de la morale. C’est une grande première... mais ce n’est pas le message universaliste que la cinquième puissance mondiale voudrait délivrer au monde.
Cette campagne semble prise en otage par les affaires. Marine Le Pen est notamment visée par deux procédures de redressement fiscal. Comment recentrer la campagne présidentielle vers un vrai débat politique ?
Je crois que nous ne l’aurons pas tout de suite... Il faudra attendre les grands débats où les candidats seront réunis pour confronter leurs idées et discuter des sujets de fond. C’est le seul espoir qui reste dans cette campagne électorale.
Première publication : 15/03/2017

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