VIDÉO. L'ancien secrétaire d'État à l'Intégration de François Mitterrand dénonce la polémique actuelle qui vise à accréditer l'idée que la France serait un pays raciste.
Propos recueillis par Jérôme Cordelier
Modifié le 13/06/2020 à 13:34 - Publié le 13/06/2020 à 09:48 | Le Point.fr
Il a été le premier maire noir élu dans l'Hexagone, à la tête de la petite commune bretonne de Saint-Coulitz dans le Finistère. Il fut aussi le premier Africain naturalisé français à siéger au gouvernement, comme secrétaire d'État aux Affaires sociales et à l'Intégration, sous François Mitterrand. Après une carrière comme député et conseiller général, ce proche de Richard Ferrand – l'actuel président de l'Assemblée nationale fut son collaborateur –, septuagénaire, deux fois père et quatre fois grand-père, coule une retraite paisible chez lui, en Bretagne. Alors que la polémique sur les violences policières cible un racisme français, celui qui, né à Bassar au Togo, a été naturalisé français à l'âge de 32 ans en récuse l'idée, défend une République française « inclusive », et condamne avec fermeté les prises de position de personnalités comme le comédien Omar Sy ou l'écrivaine Virginie Despentes. « Maintenant, il faut parler », nous a dit Kofi Yamgnane, désolé de la confusion actuelle du débat, en répondant à notre sollicitation.
Le Point : La France de 2020 est-elle un pays raciste ?
Kofi Yamgnane : Non, non, non ! Pas plus en 2020 qu'auparavant. Nous n'avons aucune institution, aucun organisme, aucune loi qui prône la ségrégation raciale. Intrinsèquement, la République française est une République inclusive. Mais avoir la nationalité française, cela se mérite. Il faut être plus blanc que blanc. N'avoir rien à se reprocher. Connaître la littérature française. Ce n'est pas donné d'être français.
Est-ce une bonne ou une mauvaise chose ?
Une bonne chose ! Un pays est souverain. C'est lui qui établit ses lois, qui propose un contrat à celui qui veut faire partie de cette communauté. Si vous souhaitez devenir citoyen, voter, vous devez vous conformer à ce que vous propose votre pays. Il faut se montrer digne d'avoir la nationalité. Je suis arrivé en France en 1964 en venant du Togo à 18 ans pour étudier à l'École des mines de Paris, et j'ai obtenu la nationalité en 1977. Cette carte d'identité, on me l'a donnée de façon incroyable. Après des démarches qui ont duré un an, j'ai reçu dans ma boîte aux lettres une enveloppe Kraft où il était simplement écrit : « À partir de maintenant, vous êtes français. » Quand je suis devenu secrétaire d'État à l'Intégration, j'ai institué une cérémonie au moment de l'attribution de la nationalité. Pour moi, il était important que ce moment soit solennisé.
Que pensez-vous de ces mouvements de « racialisme » et d'« indigiénisme » qui se manifestent bruyamment dans la société française ?
Tout cela n'a aucun sens. Je veux bien croire que l'accueil des travailleurs qualifiés en France n'est pas bon. Aucun Malien, aucun Togolais, aucun Tchadien ne vient pour envahir la France. Ils suivent tous des projets individuels. Mais, quand ils arrivent, la République les met dans des départements, des quartiers où ils se regroupent. Tout cela n'a aucun sens. Nous n'agissons pas bien avec eux. Il faut laisser les gens s'installer où ils veulent et, surtout, faire en sorte qu'ils se mélangent. Avoir fait des études d'ingénieur, m'être marié avec une Bretonne, être baptisé et avoir passé mon enfance à la campagne ont favorisé mon intégration. Je ne comprends pas que des ressortissants étrangers puissent décider de se regrouper entre eux en excluant les autochtones. Le Cran, les Indigènes de la République, tous ces mouvements, je ne les comprends pas. La lutte contre le racisme est devenue une légitimation du communautarisme. Or, la République ne reconnaît pas le communautarisme mais les individus. Le racisme est une idéologie, une posture qui va à l'encontre des principes de la République. Tous les Français qui sont dignes de la République doivent combattre cela. On ne peut pas lutter contre le racisme par des combats particularistes. Nous ne pouvons pas vivre ensemble en renonçant à la mixité sociale et raciale. Sinon, on se regarde en chiens de faïence, comme cela se passe actuellement. Il faut que les étrangers qui viennent en France entrent de plain-pied dans la société française, qu'ils en acceptent les lois, je le dis en particulier pour mes compatriotes musulmans : la loi de la République est supérieure à celle d'Allah !
Avez-vous lu la tribune d'Omar Sy dans L'Obs dénonçant les violences policières en France, liées au racisme ?
Oui, je l'ai lue et je la trouve très exagérée. Il est dommage qu'Omar Sy se soit laissé aller à une telle polémique. Il ne fait pas mieux qu'Éric Zemmour : il souffle sur les braises, et allume des incendies. Si l'on continue ainsi, on ne réussira jamais à vivre ensemble. Évidemment qu'il y a des racistes en France, mais comme au Togo ou en Algérie… Et des racistes, on en trouve dans tous les corps de métier. Au nom de quoi la corporation des policiers échapperait-elle à une telle dérive ? Les policiers et les gendarmes ne sont pas des extraterrestres. On trouve parmi eux des racistes comme ailleurs. Comme ils sont les bras armés de l'État, ils doivent dans leur formation recevoir des cours de déontologie poussés, ils se doivent d'être des personnes d'élite. Maintenant, comment peut-on affirmer que la police française est raciste ? Il faut souligner la gravité de cette accusation.
« En France, nous ne sommes pas racistes, mais je ne me souviens pas avoir jamais vu un homme noir ministre. Pourtant j'ai 50 ans, j'en ai vu, des gouvernements. »Avez-vous lu aussi cette lettre ouverte de l'écrivaine Virginie Despentes diffusée sur France Inter qui commençait par ces mots ?
(rires). Oui, je l'ai lue aussi. Il est étonnant que Virginie Despentes ait écrit cela, car elle n'est pas la première venue. Elle devrait savoir qu'avant les indépendances de leur pays respectif l'Ivoirien Félix Houphouët-Boigny et le Sénégalais Léopold Sédar Senghor furent ministres français. Elle devrait se souvenir qu'il y eut, après, au gouvernement, notamment, des hommes comme Roger Bambuck, puis moi qui venais d'Afrique, et plus récemment Laura Flessel ou Sibeth Ndiaye. Faut-il rappeler que l'actuelle porte-parole du gouvernement est née au Sénégal ?
Existe-t-il en France un problème « Noir » ?
Un problème, je ne crois pas. Même si l'on rencontre sans doute davantage de difficultés pour trouver du travail, un logement dans les mêmes conditions que nos collègues blancs. Je l'ai moi-même subi quand je cherchais un logement à Châteaulin [dont Kofi Yamgnane fut plus tard le conseiller départemental,NDLR], en Bretagne, en 1973. Ma femme, une Bretonne pure sucre, ou plutôt pure beurre, faisait une première visite. Puis elle revenait avec moi, et alors on nous disait : « Désolé, mais depuis que vous êtes passée, l'appartement est loué. » Combien de fois l'ai-je entendu cette phrase !
Considérez-vous l'intégration plus ou moins difficile aujourd'hui qu'à votre époque ?
Plus difficile, je pense. J'ai reçu récemment un jeune Métis brestois, un gars solide de 20 ans, très baraqué. Il m'explique qu'il habite à côté de Paris, à Ivry-sur-Seine. Je lui dis alors qu'il doit bien profiter des sorties dans la capitale. Et il m'explique qu'après le travail il rentre directement chez lui. Je m'étonne. Il me rétorque que dès qu'il sort, il se fait contrôler. Il tombe sur une première brigade, doit sortir ses papiers, puis il parcourt 500 mètres, et une deuxième brigade lui demande de nouveau ses papiers. Et ainsi de suite. Alors, il me confie : « J'ai peur à la longue de m'énerver, de soulever le flic qui me demande mes papiers, de lui fracasser la tête sur un trottoir. Son collègue, alors, me tirera dessus. Et cela fera deux morts pour rien. »
dimanche, juin 07, 2020
Macron repousse le coronavirus. La France n'est pas impressionnée.
PARIS - Le gouvernement du président Emmanuel Macron a repoussé le coronavirus, empêché les licenciements massifs, soutenu les salaires des chômeurs, évité les longues files de nourriture et atteint un taux de mortalité inférieur à celui de ses voisins, à l'exception de l'Allemagne.
M. Macron a ordonné un verrouillage strict qui a duré près de deux mois et, une fois terminé, le virus circulait à peine. Mais alors que la réponse précoce pourrait être mise en cause pour une certaine lenteur et une pénurie de masques, et plus de 29000 personnes sont mortes, la France s'en sort mieux que beaucoup dans la pandémie, en particulier par rapport aux États-Unis, en Italie, en Espagne et en particulier en Grande-Bretagne.
Ne dites pas cela aux Français, qui en veulent plus que jamais à Macron.
Les Français attendent beaucoup de leurs dirigeants et les trouvent presque toujours en manque. M. Macron ne fait pas exception. En fait, meilleurs sont les résultats, moins les Français semblent disposés à applaudir leur président. Cette tendance s'est maintenue pratiquement depuis que M. Macron a pris ses fonctions en 2017, jetant une ombre sur un mandat expirant dans deux ans.
M. Macron a réduit le chômage et créé plus d'emplois, mais les Français lui en voulaient d'avoirassoupli les protections du travail. Il a égalisé le système de retraite des plus démunis du pays et il y a eu des mois de grèves de syndicats et de citoyens lésés méfiants de ses intentions.
Même si les Français ont célébré leur libération provisoire de l'isolement cellulaire cette semaine avec la réouverture partielle très attendue des cafés et des restaurants , le coronavirus n'a fait que renforcer le paradoxe des relations difficiles du président avec ses propres citoyens
"Le déconfinement se déroule plutôt bien", a expliqué Olivier Galland, sociologue au Centre national de la recherche scientifique. «Mais les Français ne semblent pas satisfaits. Mais je ne pense pas qu'ils puissent jamais être satisfaits. »
Vendredi, le chef du conseil scientifique du gouvernement, l'immunologue Jean-François Delfraissy, a déclaré l'épidémie «sous contrôle» en France, dans une interview à la radio française. Pourtant, les Français, bien plus que leurs voisins européens, ont sévèrement jugé la performance du gouvernement face à la crise sanitaire.
«La méfiance est un élément structurel de la société française, stable et bien établie», a écrit M. Galland dans un récent article sur «La Grande Dépression des Français» pour Telos , un site Web de science politique largement suivi.
En moyenne, plus de la moitié des citoyens européens, hors de France, jugent favorablement les performances de leur gouvernement face au virus, même dans les pays où les résultats sont bien pires. En France, 66% ont une opinion défavorable, selon un récent sondage Figaro.
M. Macron s'est raidi et avait l'air impatient lorsqu'il a été interrogé récemment à la télévision française sur son impopularité.
«Écoutez, je ne reste pas désolé pour moi-même», a-t-il dit. «Je regarde vers l'avenir.»
"Pendant des décennies, ce pays a connu le doute et la division", a ajouté M. Macron. '' Je ne crois pas aux miracles. Cette France méfiante existe. Cela n'a pas changé. "
Quel que soit le crédit que le gouvernement français tire de son succès dans la lutte contre le virus, il revient plutôt au premier ministre discret de M. Macron, Édouard Philippe.
"Les nouvelles sont plutôt bonnes", a déclaré M. Philippe la semaine dernière, après avoir examiné les résultats après le verrouillage. Plus de 60% l'ont trouvé convaincant dans un sondage réalisé par le cabinet de sondage indépendant Odoxa pour Le Figaro et France-Info.
En signe d'ascendance politique, M. Philippe faisait la couverture de L'Obs , un hebdomadaire d'actualité populaire de la semaine, avec le titre «The Tough Guy».
"Macron peut-il se passer d'Édouard Philippe?" le magazine a demandé, en descendant sur la spéculation que M. Macron allait larguer un Premier ministre qui a volé la vedette une fois la crise terminée.
Pourtant, les mesures du gouvernement - un verrouillage strict, la mobilisation de la technologie française comme les trains à grande vitesse pour sauver les patients et le suivi attentif des conseils des scientifiques - appartenaient à M. Macron. C'est la voie française: le président décide et la nation suit.
Mais cela signifie que M. Macron est également responsable de la pénurie précoce de masques, ce que le gouvernement n'a pas admis au départ et qu'une porte-parole a minimisée. L'affaire a agité les médias français pendant plusieurs semaines, mais a depuis largement disparu. Dans la rue, certains portent des masques, mais beaucoup n'en portent pas.
"Ce qui est le plus problématique, c'est qu'on nous ment en fait", a déclaré Marie Balaril, 27 ans, professeur de sciences sociales dans une université parisienne, alors qu'elle se souvenait du refus du gouvernement de reconnaître que le pays avait fait face à une pénurie de masques.
Le président a vigoureusement défendu son bilan. "Soyons honnêtes", a déclaré M. Macron lors d'une récente interview télévisée. «Début mars, personne ne parlait de masques.»
«Quand je regarde autour de moi, personne n'était prêt», a-t-il déclaré. ''Personne. Personne.''
Le taux de mortalité par habitant en France est plus élevé qu'aux États-Unis, avec plus de 100 000 décès. Mais la France a une densité de population - variable clé de l'épidémie - plus de trois fois supérieure. Les courbes d'hospitalisation et de mortalité en France sont en forte baisse depuis environ la deuxième semaine d'avril.
Contrairement à ceux de la rue, de nombreux experts et autres personnes interrogées ont donné de bonnes notes au gouvernement.
Guillaume Chiche, un parlementaire qui a récemment déserté le parti de M. Macron - un autre signe de la baisse de popularité du président français - a déclaré que les actions du gouvernement "étaient très fortes".
'' Maintenant, ils semblent logiques. Mais à l'époque, ils étaient tout sauf neutres », a déclaré M. Chiche, soulignant les mesures visant à augmenter les salaires, à interdire les cérémonies religieuses et à imposer le verrouillage. "Je pense qu'ils ont fait des choix qui étaient optimaux."
Pourtant, il a rejoint 13 autres parlementaires qui ont déserté le parti du président français en mai, le privant de sa majorité - un coup symbolique largement interprété dans les médias français comme un signe inquiétant pour l'avenir de M. Macron.
M. Chiche, un ex-socialiste, a été l'un des critiques du président de gauche, un groupe le jugeant trop favorable aux affaires et le pressant de "définir un nouvel horizon", comme l'a dit M. Chiche.
Frédéric Keck, anthropologue et expert en biosécurité, également au Centre national de recherche scientifique, a qualifié la gestion de la pandémie de M. Macron de «très bonne».
«Gestion très centralisée autour du président. Très français, mais aussi relativement efficace », a-t-il déclaré.
"Cette insatisfaction est le reflet d'une demande excessive de sécurité", a ajouté M. Keck. Mais lui aussi a noté que M. Macron n'obtenait pas beaucoup de crédit.
Plus de la moitié des Français approuvent le plan de réouverture du gouvernement. Mais ils n'approuvent pas M. Macron: seulement 30 à 40% l'ont jugé capable de faire face à l'épidémie. Dans un autre sondage Figaro, 62% des personnes interrogées ont trouvé la manière de M. Macron «arrogante» et «autoritaire».
À certains égards, M. Macron est son pire ennemi, avec un style qui peut sembler impérieux. Ses discours pendant la crise étaient longs et littéraires, deux marques de fabrique. Il a d'abord reproché aux Français de manquer de «sens des responsabilités», puis les a félicités pour leur discipline.
"Il aime ces épanchements lyriques, et les gens ne sont tout simplement pas enthousiastes à ce sujet", a déclaré M. Galland.
Lors de sa récente apparition à la télévision, M. Macron a rencontré un groupe de chefs malheureux par vidéoconférence du Palais de l'Élysée.
Les chefs - certains des noms les plus célèbres de la cuisine française, dont Alain Ducasse - n'ont pas caché leur frustration d'être contraints de rester fermés pendant le verrouillage.
«Nous ne sommes pas optimistes quant à la survie d'environ la moitié de nos restaurants», a déclaré M. Ducasse.
M. Macron n'a pas été impressionné. Il sourit légèrement à la grogne, puis donna une leçon aux chefs qui se plaignaient.
«Écoutez, j'aime la liberté autant que vous», a déclaré M. Macron. Mais ce qu'il faut retenir, c'est qu'il est bon d'exercer cette liberté dans un pays comme la France. C'est bon de vivre dans un pays où l'État est fort. »
Il a ajouté, ostensiblement, "Il y a d'autres pays où l'État laisse les gens échouer."
Constant Meheut a contribué au reportage.
samedi, novembre 16, 2019
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samedi, octobre 19, 2019
Bernard Stiegler : Etat d'urgence, géopolitique, Médias, Gilets Jaunes [...
La police accusée de racisme : "un complot médiatique et politique", dénonce le chef du syndicat des commissaires
Le parquet de Paris a ouvert une enquête sur des propos racistes tenus par des forces de l'ordre sur internet. Une procédure "normale" juge David Le Bars. Mais il estime que 8 000 policiers et gendarmes sur un groupe Facebook, "ça ne fait toujours pas des institutions racistes de manière systématique".
Si les propos racistes de policiers sur un groupe Facebook "sont avérés, ils devront être sanctionnés", a déclaré, vendredi 5 juin, sur franceinfo, David Le Bars, secrétaire général du SCPN, syndicat des commissaires de la police nationale. Il réagit à l'ouverture d'une enquête par le parquet de Paris, saisi par le ministre de l'Intérieur, à la suite de la révélation de commentaires racistes dans article du site d'information Streetpress.
David Le Bars assure que les 8 000 policiers et gendarmes réunis dans un groupe, "ça ne fait pas de la police et de la gendarmerie des institutions racistes", et assure que "quand un chef de service a un signalement d'un fait de racisme, on ne laisse jamais passer".
franceinfo : Comment réagissez-vous à l'ouverture par le parquet de Paris d'une enquête sur des messages racistes publiés par des policiers et des gendarmes sur Facebook, enquête ouverte après une saisine du ministre de l'Intérieur ?
David Le Bars : Ma réaction est très simple, très directe : cette saisine du parquet est parfaitement normale, il y a des propos racistes tenus sur un groupe par des policiers ou des gendarmes. Si ces faits sont avérés, ils devront être sanctionnés, la justice devra passer.
Je voudrais donner un élément, 8 000 policiers et gendarmes sur un groupe Facebook, ça ne fait toujours pas de la police et de la gendarmerie des institutions racistes de manière systématique parce que c'est moins de 3% de l'effectif.David Le Bars, secrétaire général du SCPN
Et deuxième point, quand un artiste dit que la police assassine en banlieue, et qu'il faut prendre les armes ou faire la révolution, on aimerait que le ministre fasse pareil et saisisse également la justice contre ces propos qui sont irresponsables. C'est ce qu'on a déjà demandé à Christophe Castaner, il s'est d'ailleurs exprimé dans la presse en disant qu'il avait condamné médiatiquement ces propos et que la plainte n'était pas nécessaire. On lui demande la même fermeté, puisque le racisme en France c'est un sujet de société, ça doit être partage, équitable.
Fabien Jobard, chercheur du CNRS et spécialiste des questions de justice et de police, a déclaré sur franceinfo que "dans la police on n'est pas raciste, on le devient". Qu'en pensez-vous ?
M. Jobard, on le connaît. Il affirme que quand on rentre dans la police a priori on est à peu près normal, et qu'ensuite le métier fait qu'on devient raciste. Moi je demande à ce sociologue de nous donner des études qui nous permettent de prouver ce qu'il affirme, j'en suis moi-même choqué. Moi je suis commissaire de police, j'ai dirigé pendant 23 ans des policiers de toutes provenances, de toutes catégories sociales, j'ai eu des commissariats totalement mixtes, puisqu'on recrute à l'image de la population. Quand un chef de service a un signalement ou une information faisant état d'un fait de racisme, on ne laisse jamais passer.
Les accusations nauséabondes qui consistent à dire que dans la police on est tous racistes, c'est une insulte à ces agents de la paix, à ces gardiens de la paix, et c'est aussi une insulte aux Français pace qu'on est en train d'affaiblir une institution.David Le Bars
Et les victimes de ce complot médiatique et politique, ce seront les citoyens qui n'auront plus de sécurité si on continue comme ça, à écouter des gens comme Matthieu Kassovitz qui demande à désarmer la police et à réduire les effectifs. Si on commence à donner écho et des suites à ce type de propos qui n'ont aucun fondement sérieux, ce sera l'ensemble de la population qui sera victime de ça, il ne faut pas en arriver là.
Pourquoi parlez-vous de complot ?
Il y a deux semaines, une artiste peut-être en mal d'audience (Camélia Jordana) a commencé le bal nauséabond en traitant les policiers d'assassins comme quoi on allait tuer des gens en banlieue. Et puis étonnamment, ça a commencé à prendre avec les mêmes personnes qui sont sur le sujet des violences policières depuis deux ans. Violence policière ça sous-entend que la police ne fait que ça. Et puis, il y a eu cette occasion de relier les violences policières au racisme, la police est violente parce qu'elle est raciste, et on est raciste donc on est violent. Ce débat n'a aucune fondement à part cet effet miroir sur l'affaire George Floyd, qui n'a strictement rien à voir avec des affaires qu'on a pu connaître en France, mais, pour certains, le raccourci est fait
Si la famille d’Adama Traoré demande la justice et la vérité, alors toute la vérité doit être connue et les mensonges sur l’affaire combattus.
Première contrevérité. Adama Traoré aurait été interpellé lors d’un contrôle aléatoire, qui accréditerait un racisme supposé des gendarmes.
Le 19 juillet 2016, c’est parce que Bagui Traoré, le frère aîné d’Adama, est soupçonné d’être impliqué dans une affaire d’“extorsion de fonds au préjudice d’une personne placée sous curatelle renforcée” que le procureur commande, sous réquisition judiciaire, un “service de prévention de proximité”. Les faits sont particulièrement accablants : le 8 juillet 2016 à Beaumont-sur-Oise, deux hommes et deux femmes sont entrés illégalement au domicile d’un couple, dont la femme est sous curatelle. Bagui Traoré fait partie de l’équipe. Ce soir de juillet, la femme vulnérable passe la soirée avec deux amis. Bagui Traoré et ses amis « exercent de nombreuses violences sur le couple afin de se faire remettre des objets », nous explique-t-on. A cette occasion, ils dérobent une bague, un collier, 40 euros en liquide, une télévision et des vêtements.
A la suite de cette agression sordide, à la demande de la justice, trois militaires du peloton de surveillance et d’intervention (PSIG) de la gendarmerie en civil procèdent à des contrôles d’identité de personnes citées dans la réquisition judiciaire. Au moment de contrôler Bagui, qu’ils reconnaissent grâce à des éléments de description — tâche de naissance sur la pommette gauche, cicatrice à l’avant-bras droit, cicatrice sur l’auriculaire gauche et le poignet gauche —, une personne qui est avec lui, et qu’ils n’identifient pas, lâche son vélo et court. Surpris, deux gendarmes le poursuivent pendant que le troisième reste avec Bagui, qui n’oppose aucune résistance. Rattrapé, l’homme bouscule un gendarme avant d’être menotté à un bras. Ne disposant pas de pièce d’identité, il déclare s’appeler Adama Traoré. Les gendarmes ne le connaissent pas. Contrairement à ce qui sera dit, ce n’est pas lui mais bien Bagui qui était donc ciblé par la demande de la justice. Puisque le débat actuel nous impose d’entrer dans des considérations de couleur de peau, notons que deux des gendarmes ayant participé à l’interpellation d’Adama Traoré étaient eux-mêmes noirs.
Deuxième contrevérité. Adama Traoré a été tué à la suite d’une bavure des gendarmes qui auraient effectué un plaquage ventral.
Selon les informations que nous nous sommes procurées auprès de plusieurs sources, après avoir été interpellé par les gendarmes le 19 juillet 2016 à Beaumont-sur-Oise, Adama Traoré demande aux gendarmes de faire une pause pour reprendre son souffle. Nous sommes alors en plein été sous un soleil de plomb. Essoufflés eux-mêmes et constatant qu’Adama l’est aussi, la demande est accordée par les militaires. Mais tout à coup, un ami d’Adama le reconnaît et l’aide à s’enfuir une nouvelle fois, en frappant un gendarme. Adama échappe une seconde fois aux gendarmes et fuit en courant. Il entre alors par effraction au domicile d’un habitant et est rattrapé par un autre équipage de trois militaires en uniforme, alors qu’il se cache, allongé par terre, enroulé dans un drap, à côté d’un canapé dans un appartement. Les gendarmes se répartissent les rôles : le premier immobilise les jambes et les deux autres s’occupent chacun d’un bras. Au cours de l’interpellation, qui dure entre trente secondes et une minute, ils s’aperçoivent que l’homme a déjà une menotte attachée au bras — celle passée par le premier équipage de gendarmes. Menotté et essoufflé, Adama se lève seul et sort debout de l’appartement, escorté par les gendarmes. A aucun moment un plaquage ventral (notion qui n’existe pas d’ailleurs dans les techniques d’immobilisation dans la gendarmerie, NDLR) n’a été effectué par les gendarmes. Le trajet en voiture jusqu’à la gendarmerie de Persan est très court : un kilomètre. Arrivé à la brigade, un gendarme s’étonne de voir Adama assoupi et découvre une tache d’urine sur le siège. En réalité, il a perdu connaissance. Immédiatement, les pompiers et le Samu sont appelés et Adama est placé à l’ombre en position latérale de sécurité, menotté — en raison des deux tentatives précédentes de fuite —, dans la cour. C’est ce que constateront deux pompiers à leur arrivée. Ce qui ne devait pas arriver se produit : malgré les tentatives pour le ranimer, il est trop tard. C’est un drame pour tous : Adama Traoré est mort.
Quatrième contrevérité. Aucune autre raison médicale que celle de la prétendue violence de gendarmes ne peut expliquer la mort d’Adama Traoré
Après avoir constaté la mort d’Adama Traoré dans la cour de la brigade de gendarmerie de Persan, les enquêteurs vont alors découvrir un début d’explication possible de la volonté d’Adama d’échapper aux gendarmes : il porte sur lui 1 300 euros en liquide et un sachet avec une petite quantité de cannabis.
D’après nos informations, un rapport d’autopsie révèlera qu’Adama était sous l’emprise du cannabis lorsqu’il est mort. Contrairement à ce qui a pu être dit, le rapport l’atteste : Adama ne présente aucune trace de violence et les gendarmes ne se sont pas assis sur lui, ce qui aurait pu provoquer une asphyxie, thèse relayée par ses soutiens. Au total, Adama a passé seulement dix minutes entre les mains des gendarmes. Tous les témoins qui ont été entendus sont unanimes : il n’y a eu aucune violence à son encontre et Adama avait du mal à respirer, parvenait difficilement à parler. Ce qui ne l’a pas empêché d’essayer de s’échapper.
Une autre explication possible. Le frère d’Adama Traoré le clame : « attention, mon frère est malade ! »
Quelques minutes plus tard, Bagui Traoré qui vient d’être interpellé, arrive à son tour à la brigade escorté par les gendarmes après une perquisition chez lui et voit Adama allongé par terre. Il crie : « Attention à mon frère, attention à mon frère, il est malade! » Il sera effectivement démontré plus tard qu’Adama — décrit en bonne santé par sa famille — souffrait en réalité d’insuffisance respiratoire et de problèmes cardiaques, ce que certains savaient. D’où son essoufflement. On annonce alors à Bagui la mort de son demi-frère. Il hurle : « Les gendarmes ont tué mon frère ! » Dans une volonté d’apaisement, le procureur décide alors de lever sa garde à vue. Persuadé que son frère a vraiment été tué par les gendarmes, Bagui mobilise alors le quartier. S’ensuivront cinq nuits d’émeutes ultraviolentes où les gendarmes seront attaqués sans répit. Un bus servira de bélier dès la première soirée, pour tenter d’enfoncer la grille de la gendarmerie.
Quatrième contrevérité. Adama Traoré était un jeune homme sans histoires
Si la mort d’Adama est un drame et que rien de la justifie, la vérité s’impose toutefois s’agissant de son parcours. Sans profession, Adama Traoré avait 24 ans lorsqu’il est mort. Selon nos informations, il était connu des fichiers de police pour “recel, violences, violences volontaires sur agent de la force publique, extorsion avec violences, menaces de mort, outrage, conduite sans permis, usage de stupéfiants, vol à la roulotte, vol de véhicule avec violences”. Il est connu pour 17 inscriptions au fichier de traitement des antécédents judiciaires (TAJ). Il a en outre fait deux séjours en prison : de septembre 2012 à juillet 2014 puis de décembre 2015 à mai 2016, où il a été accusé d’avoir violé son codétenu.
S’agissant de cette accusation de viol, nous l’avons appris : le 25 février 2017, pour venger Adama de l’accusation, un de ses 17 frères et sœurs, Yacouba Traoré passe à tabac avec plusieurs amis l’ancien codétenu à coups de planche et de bâtons. « Sérieusement blessée, la victime se voit attribuer provisoirement 7 jours d’ITT », confiait à l’époque une source proche du dossier. A la suite de cette agression, Yacouba Traoré sera condamné à 18 mois de prison ferme le 15 mars 2017.
Par "Sigaps", membre du Think Tank Lisa le 02-06-2020
Dans une tribune, "Sigaps", membre du Think Tank Lisa, tacle les méthodes utilisées par le Pr Didier Raoult et reproche au désormais célèbre infectiologue d'avoir sauté sur "l'aubaine" de l'épidémie de coronavirus pour briller aux yeux du monde entier. Voici son texte tel qu’il nous a été transmis.
A travers cette lettre, je souhaite vous exprimer tout ce que m’inspire le positionnement que vous adoptez depuis le début de cette crise et apporter quelques éléments de compréhension à celles et ceux qui s’intéressent à votre projet – difficile de ne pas s’y intéresser d’ailleurs…
Tout d’abord, je me permets un "Cher collègue" car, comme vous, je suis PUPH (Professeur des universités –Praticien hospitalier). Certes, dans une discipline bien éloignée de la vôtre, puisque dans la mienne, l’humain et ses vulnérabilités sont au centre des préoccupations des soins que nous prodiguons et des recherches que nous menons.
Comme vous, je suis un provincial et n’ai fréquenté, en dehors de quelques escapades en Amérique du Nord pour y effectuer mon post-doc, qu’une seule ville, de mes études à l’exercice de mon métier. Il sera difficile de m’accuser de parisianisme. Et j’utiliserai un pseudonyme, non pas que je craigne de vous dévoiler mon nom mais parce que j’occupe à l’heure actuelle des fonctions qui m’imposent un devoir de réserve. Je vous propose donc "Sigaps" comme pseudonyme. Cela vous parlera. Car à l’évidence, comme le souligne Pascale Pascariello dans son article particulièrement bien documenté du 7 avril, dans Médiapart, la course aux points bibliographiques et à l’index h semble avoir pris le pas sur les aspects éthiques de votre démarche scientifique.
La première fois que j’ai entendu parler de vous, c’était lors d’une réunion de ma discipline dans votre ville. En passant devant l’imposant bâtiment de votre IHU, mes collègues marseillais m’ont parlé de vous, en m’indiquant que vous étiez le meilleur au monde pour les rickettsies et que vous aviez un index H affolant… déjà !
Que vous découvriez avec vos équipes de nouveaux micro-organismes, dont on ne sait pas toujours bien quoi faire, comme d’autres enchainent les buts au stade vélodrome tout proche.
Intrigué, je me souviens avoir lu à l’époque quelques brèves à votre sujet lors de mon voyage retour, sans réussir à me faire une idée bien précise. Mais bon, en dehors du monde de votre discipline, dont il faut bien avouer qu’elle n’était pas au premier plan des préoccupations en matière de santé jusqu’au mois de janvier dernier, vous n’étiez en définitive pas très connu.
Mais depuis quelques semaines, tout a changé. Et vous avez certainement reniflé l’aubaine qui se présentait à vous pour enfin...
montrer au pays tout entier, voire au monde, qui vous étiez. Car vous n’êtes pas n’importe qui.
Il faut en effet savoir que les enseignants chercheurs placés à la tête des sept IHU (Instituts Hospitalo-Universitaires) français - 4 à Paris, 3 en province - sont de grands chercheurs, considérés même pour certains comme nobélisables. Et à quoi reconnaît-on un grand chercheur ? A la taille de son index H, de son « impact factor » et autres points Sigaps en France. C’est-à-dire principalement au nombre de publications qu’il a signées mais pas dans n’importe quelle revue et pas à n’importe quelle place. A la première ou à la dernière de la liste des auteurs. Les deux places les plus prestigieuses, celles qui rapportent le plus de points et donc de reconnaissance. La première c’est en général celle de l’étudiant en master, en doctorat ou en post-doctorat, qui a réellement réalisé les travaux et qui a rédigé le premier jet de l’article. La dernière, c’est la place du chef, du patron, du boss, de celui qui, en théorie, a eu l’idée de la recherche et a guidé les travaux de son étudiant.
Tout cela vous le savez parfaitement, cher collègue. Et vous avez compris très vite que pour exister dans ce milieu, il faut de la « publi ». Point barre. Ce que regardent les experts quand ils viennent faire leur rapport dans nos équipes et laboratoires, ce sont ces index, ces points, que l’on prend soin de bien mettre en exergue dans nos présentations. Et ça aussi vous savez très bien le faire. Les experts ne regardent pas toujours le contenu de tous les papiers. Souvent, le titre, le rang des auteurs, la revue, parfois « l’abstract » et pour le reste, ils font confiance aux comités éditoriaux des revues dans lesquelles les articles ont été publiés. Mais bien entendu, quand on publie surtout dans les revues dont les membres du comité éditorial sont de proches collègues, on passe là un cap dans la maîtrise du système !
Car il faut bien comprendre que notre système de promotion, à nous les PUPH, de valorisation et même de classement de valeur pour certains, est encore essentiellement basé sur ces fameux index de publication. Ils sont nos « bitcoins ». Plus on en a, plus on grimpe dans la hiérarchie, plus on a de facilité à lever de nouveaux fonds, publics ou privés et au final, plus on a de pouvoir. « Publier ou périr », vous connaissez l’adage.
Et c’est un écueil majeur pour les disciplines médicales, qui a conduit pendant de nombreuses années à choisir des « machine à publier » comme futurs enseignants chercheurs de haut rang, plutôt que d’excellents enseignants, cliniciens ou chirurgiens mais qui préféraient passer leur temps auprès des patients et des étudiants plutôt que sur leur ordinateur ou à leur paillasse. Bien entendu, il y a des exceptions mais je ne suis pas certain que vous en fassiez partie. Les patients, ça doit faire bien longtemps que vous les voyez surtout à travers les colonnes de vos tableurs.
Vous maitrisez ce système à la perfection, vous en avez compris les failles, les biais et vous avez même réussi, pendant un certain temps au moins, à mettre à votre botte les grands organismes de recherche, qui ne pouvaient certainement pas résister aux bilans prolifiques que vous affichiez en matière de publications.
Certaines conclusions des rapports du HCERES (campagne d’évaluation 2016 -2017 – disponibles en ligne) les ont semble-t-il conduits à revoir leur jugement. En effet, en dehors de quelques éloges introductifs (reconnaissance internationale, découvertes remarquables de certains virus et bactéries, volume de publications – on y revient…), lire à la fin de la conclusion les phrases suivantes : « Little information was provided on sources of funding for the VITROME unit » ou encore « Much of the research appears to be undertaken by national or international PhD students with a large proportion coming from countries of the south …, with only a small pool of post-doctoral researchers », interroge pour le moins. [1]
Mais la perte du soutien du CNRS et de l’INSERM, ne vous a certainement pas affaibli. Cela a même...
dû renforcer votre volonté de montrer à ces tutelles, noyautées par les Parisiens, que vous n’aviez besoin de personne pour poursuivre votre parcours de chercheur de haut rang. Certainement sans aucune remise en question de votre responsabilité dans les critiques formulées.
Et le grand jour est enfin arrivé. La crise du covid vous a offert une occasion en or de montrer enfin quel mentor vous êtes, un de ceux capables de sauver de la maladie la France voire l’humanité toute entière.
Et d’observations bien fondées sur l’efficacité potentielle de certaines molécules, vous avez dérivé vers une stratégie de recherche de « guerre », qui s’exonère de tous les principes cardinaux de la médecine basée sur les faits. Vous citez le Maréchal Foch pour convaincre du bienfondé de votre démarche « Les règlements, c’est bon pour l’exercice, mais au moment du danger, il faut autre chose. Ce sont les guides-ânes qui favorisent la paresse d’esprit ».
Nous y voilà, ce qu’il nous faut en définitive, c’est un guide tout court. Un visionnaire, qui sait aller au-delà des principes et des règles élémentaires de la recherche médicale. Ces mêmes règles qui ont pourtant permis, depuis des décennies, de soigner efficacement tant de maladies. Mais nous n’avons pas le temps ici de nous plier à ces contraintes technocratiques de la recherche moderne. Il faut aller vite car le danger est à nos portes, faisant craindre le pire à chacun d’entre nous. Ce qu’il nous faut donc, c’est quelqu’un de charismatique, capable de contraindre ou convaincre suivant les cas, les politiques et les affreux bureaucrates de la médecine. Quelqu’un qui montre la voie, évidente, portée par des études historiques à défaut d’être scientifiques... Comment résister à de telles promesses en temps de grande vulnérabilité collective face à une situation si anxiogène, quand les autres nous parlent d’essais contrôlés qui vont nécessiter des semaines avant de montrer d’éventuels résultats et que nos proches, nos parents tombent malades et meurent ? Impossible. Ce qu’il nous faut, c’est un Pr Raoult, un Maréchal Raoult !
Je ne discuterai pas plus avant la méthodologie de vos recherches. D’autres plus qualifiés que moi s’en chargent déjà. Mais quand même, vous entendre produire tant de sophismes à longueur de tweets et de vidéos auto-promotionnelles est assez consternant. Un parmi d’autres qui m’a frappé : « Regardez, les traitements que je propose sont les plus prescrits par les médecins qui s’occupent du Covid dans le monde, donc ça marche ! ». Sérieusement, croyez-vous à ce que vous dites ?
Non, je ne discuterai pas davantage vos méthodes de recherche ni les résultats attendus ou espérés de l’association thérapeutique que vous promouvez. Nous verrons bien et rapidement quelle est leur réelle portée. Ce qui m’intéresse c’est de savoir comment vous êtes passé de professeur reconnu à gourou. Car incontestablement, vous avez quitté le monde misérable des PUPH étriqués. Vous cochez maintenant tous les critères diagnostics du « maître ». Je vous rappelle les principaux [2] : un esprit brillant (ne vous méprenez pas, on parle aussi de surdoué déviant !), une imagination sans limite, un sens aigu de la séduction et de la communication (pas besoin de détailler), des tendances mégalomaniaques (sans blague : plus grosse série mondiale, meilleur labo de recherche en infectiologie du monde…), une personnalité paranoïaque, un sentiment...
permanent de persécution et une hétéro-agressivité (parlez-en avec vos anciens collaborateurs et post-doc ou revoyez la belle chanson que vous avait consacrée la revue des internes de l’APHM en 2018). Bref, le tableau me semble complet et je pense qu’aucun « psy » de France et de Navarre n’aura raté le diagnostic. Et le gourou que vous êtes devenu joue sur du velours par les temps qui courent, exploitant nos craintes, nos doutes dans les solutions rationnelles, les failles de nos institutions et l’avidité des médias pour les « bons clients » comme vous et vos soutiens.
La difficulté quand la mégalomanie s’installe : impossible de résister à la lumière. Et vous revoilà en train de nous servir un peu de théorie du complot. En substance, si votre traitement ne connaît toujours pas le succès escompté, c’est entre autre parce que les scientifiques et les gouvernements des pays du Nord, de mèche avec les majors de l’industrie pharmaceutique, ne veulent pas soutenir des propositions thérapeutiques peu coûteuses qui ne rapporteront rien au grand capital. C’est le système qui veut ça ! Ah bon, et bien vous m’expliquerez à l’occasion pourquoi l’aspirine, l’un des plus vieux médicaments du monde et qui ne coûte pas grand-chose, continue d’être prescrit comme un traitement socle dans de nombreuses pathologies, et pas des moindres. N’est-ce pas tout bêtement parce que l’aspirine a montré son efficacité à travers des essais comparatifs randomisés ? Oups, gros mot, désolé !
Et encore une fois, vous vous êtes prêté à quelques raisonnements apagogiques. Du style, si les pays du Sud ou d’Extrême Orient s’en tirent mieux que ceux du Nord en termes de mortalité, c’est parce qu’ils n’ont pas le choix, puisqu’ils sont pauvres et qu’ils suivent vos préconisations avec des traitements qui ne coutent rien. En tant que scientifique, cela ne vous dérange pas de faire de telles démonstrations par l’absurde ? Vous n’avez aucune interrogation concernant les taux de mortalité rapportés par ces pays ?
Il me tarde également de pouvoir lire au complet votre 3ème étude, réalisée sur 1061 volontaires et dont vous avez présenté fièrement les résultats au Président. En l’occurrence, je serai très intéressé de connaître les critères d’inclusion mais surtout l’analyse que vous faites du principal résultat obtenu et présenté : un taux de mortalité à 0.5 % dans ce groupe traité selon votre protocole habituel. Là on ne parle pas de « guérison virologique » mais bien d’un effet clinique important. Celui qu’on espère tous quand on traite une maladie grave : réduire la mortalité. Le problème ici, c’est que la mortalité « naturelle » du Covid-19 a été estimée selon une modélisation mathématique difficilement discutable à 0.53 % [0.3 ; 0.9] en France, en période de confinement [3]. En d’autres termes, vous obtenez un taux de mortalité équivalent (et non pas plus bas) de celui attendu. Pas de différence. Qu’en pensez-vous ?
Je souhaite de tout cœur que d’autres que vous réussissent à apporter des arguments scientifiques complémentaires en faveur des propositions thérapeutiques que vous formulez. Même pour un effet mineur, tout le monde sera preneur. Ce sera important pour les patients d’abord mais aussi pour les médecins...
et tous les soignants qui vous ont gratifié de leur confiance, aveugle pour le moment.
Pour vous aussi, cette confirmation sera nécessaire. Car je n’imagine pas un instant que, dans le cas contraire, les instances universitaires, scientifiques et éthiques, voire même les politiques, dont certains font mine de vous soutenir aujourd’hui, résistent à vous réclamer quelques comptes. Et peut-être même que certains auront la bonne idée de revoir vos publications antérieures pour vérifier leur sincérité. Vous ne seriez pas le premier à devenir un incompris du milieu scientifique français. Vous le vivrez certainement ainsi et comme d’autres avant vous, vous irez peut-être poursuivre votre carrière dans d’autres pays moins regardants mais plus reconnaissants de votre talent. Avec un peu de chance, vous pourriez même devenir un beau cas d’étude pour les étudiants en épistémologie, science des sciences, que vous aimez tant et qui vous le rendra peut-être.
Je voudrais avoir aussi une pensée pour vos collaborateurs et vos étudiants qui doivent quand même se demander de temps à autre si la voie que vous leur proposez est réellement celle qu’ils doivent suivre. Cela doit être redoutablement difficile pour eux. Et je me permets aussi de saluer bien bas tous les soignants qui s’occupent au quotidien des patients Covid+ dans les hôpitaux et services de réanimation de votre région, dont celui de l’APHM et qui savent eux, que l’affaire n’est pas aussi simple que vous le décrivez.
Je ne me fais aucune illusion sur l’impact qu’aura mon courrier. Le propre des personnalités comme la vôtre est justement de se nourrir des critiques pour justifier encore davantage leurs positions. Mais peu importe, Cher Collègue, j’avais malgré tout envie de vous l’écrire et de le partager.
Pour finir, vous vous êtes autorisé à convoquer Hippocrate pour justifier votre démarche et la constitution d’une longue file d’attente devant votre IHU, espérant pouvoir bénéficier du traitement promis comme on reçoit l’hostie.
Alors permettez-moi à mon tour de vous rappeler juste quelques phrases de ce serment que vous avez prêté : « Je ne tromperai jamais leur confiance (des patients) et n’exploiterai pas le pouvoir hérité des circonstances pour forcer les consciences... Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire… Que les hommes et mes confrères m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses ; que je sois déshonoré et méprisé si j’y manque. »
Certains d’entre nous pourraient vous en reparler, le moment venu.
«La rhétorique victimaire de Camélia Jordana fait le jeu de la haine anti-flics»
FIGAROVOX/TRIBUNE - En déclarant samedi soir sur France 2 qu’elle ne se sent «pas en sécurité» face à des policiers et que des personnes sont «massacrées» par la police «à cause de leur couleur de peau», la chanteuse reprend à son compte la vulgate idéologique de l’indigénisme, argumente Paul Godefrood.
Par Paul Godefrood
Paul Godefrood est ancien élève de l’ESSEC. En septembre 2017, il a lancé «La Nouvelle Garde», un site dont l’ambition est de participer à la refondation de la droite sur une base libérale conservatrice.
Il y a quelques semaines, alors que le confinement était sur le point de prendre fin en France, quelque deux cents artistes et scientifiques signaient un appel refusant le «retour à la normale», synonyme selon eux de surconsommation et de destruction des écosystèmes fragiles. Parmi eux, quelques acteurs ayant engrangé de jolis cachets pour figurer dans des publicités pour des véhicules polluants ou des croisières dont on connaît l’impact sur la biodiversité marine, certains chanteurs ne prenant pas la peine de compenser écologiquement leurs nombreuses tournées internationales et d’autres artistes comme Juliette Binoche passant leur temps à signer appels et tribunes à défaut d’étudier des projets artistiques qui se raréfient.
Samedi soir, l’émission de Laurent Ruquier nous a offert une nouvelle occasion de constater à quel point la densité intellectuelle de quelques-uns des artistes était inversement proportionnelle à leur volonté d’investir le débat public.
Dans une émission dont on avait oublié qu’elle existait encore, parmi un panel d’intervenants respirant la diversité des opinions, une chanteuse, Camélia Jordana, nous a livré une de ces saillies dont on a toujours du mal à se relever tant elle atteint des hauteurs d’indécence. Dans une logorrhée que ne venait mollement interrompre qu’un contradicteur maîtrisant aussi peu le sujet en question qu’elle-même, la chanteuse révélée en 2009 par un télécrochet affirmait «ne pas se sentir en sécurité face à un flic» et dénonçait les «massacres» (sic) dont sont victimes «les hommes et les femmes qui vont travailler tous les matins en banlieue» pour «nulle autre raison que leur couleur de peau» (sic). Une profession entière salie en toute tranquillité à une heure de grande écoute, des mensonges ignominieux proférés avec candeur, un rapport au réel inquiétant et une participation enthousiaste aux fractures identitaires qui secouent notre communauté politique.
Cette polémique est symbolique de la haine anti-flics qui convulse la société
Si l’histoire personnelle de Camélia Jordana décrédibilise immédiatement et irrévocablement toute prétention à incarner la révolte des banlieues, cette polémique est néanmoins symbolique de la haine «anti-flics» qui convulse des pans entiers de notre société et qui assimile les forces de l’ordre à des cow-boys ou à une milice.
Cette haine balaye d’un revers de main les derniers résultats de l’étude annuelle de l’ONDRP, selon laquelle un peu plus de vingt mille policiers et gendarmes ont été blessés en 2018, soit le niveau le plus élevé depuis 2009! Parmi eux, un peu moins de la moitié l’ont été en mission, lors d’une participation à une opération de maintien de l’ordre, de sécurité publique ou d’investigation, et plusieurs centaines ont été blessés après usage d’arme à feu. Ces chiffres, sans doute la chanteuse les ignore-t-elle.
Ce sont les forces de l’ordre qui ne se sentent plus en sécurité
Car la réalité est qu’aujourd’hui, ce sont les forces de l’ordre qui ne se sentent plus en sécurité. En parallèle de la menace terroriste, des manifestations parfois violentes des gilets jaunes, des mouvements sociaux contre la réforme des retraites dont les cortèges sont suivis des professionnels de l’émeute, de l’épidémie de Covid-19 et du confinement à faire respecter, les forces de l’ordre doivent faire face chaque semaine à des tensions dans certains squares et certaines cités de Villeneuve-la-Garenne, Aulnay-sous-Bois, Mantes-la-Jolie, Trappes, Créteil, Gennevilliers, La Courneuve, Évry, etc.
La réalité est que la simple présence de forces de l’ordre dans certains endroits suffit à provoquer des attroupements, à générer une tension qui peut déboucher à n’importe quel moment sur une prise à partie violente des forces de l’ordre. Les derniers événements de Villeneuve-la-Garenne nous ont montré jusqu’où pouvait aller cette violence à leur encontre: véhicules caillassés, tirs de mortier à l’encontre des personnels, incendies des commissariats à l’aide de cocktails molotov.
Dans ces mêmes endroits, que les dispositifs de reconquête républicaine ont bien cernés, la peur a changé de camp et les policiers n’y interviennent que lorsqu’ils sont en nombre suffisant. Les policiers, mais également les pompiers dont les agressions, toujours selon l’ONDRP, ont augmenté de 21 % en 2018 par rapport à l’année précédente et de plus de 200 % en dix ans. À Marseille et dans l’agglomération parisienne, l’augmentation en 2018 était respectivement de 18 et de 48 %. Il n’est pas jusqu’au SAMU et aux médecins qui n’échappent à cette violence.
Car la réalité que Camélia Jordana feint de ne pas voir, elle qui ne vit pas dans ces quartiers, est que, derrière les références constantes à la précarité des banlieues, aux injustices chroniques dont les habitants seraient les victimes, à «l’islamophobie» et au prétendu racisme de la société française, se cache un projet sécessionniste.
Les forces de l’ordre sont perçues par certains comme une armée d’occupation
Dans ces quartiers, les forces de l’ordre et toute autre représentation de l’État, et donc de la France, sont perçues par d’aucuns comme une armée d’occupation ; et ceux qui la combattent, au-delà des intérêts économiques juteux qu’ils tirent de l’absence d’ordre républicain, se voient comme les nouveaux «combattants de la liberté». Dans l’esprit de certains d’entre eux, ils affrontent dans leurs cités les policiers comme leurs grands-parents l’armée française en Algérie.Les revendications larmoyantes n’ont nullement pour objectif une application pleine et entière de la loi, pour les citoyens comme pour les policiers, mais tendent à substituer la loi des caïds à la loi républicaine, l’autogestion à l’autorité de l’État. Les violences envers la police et l’État ne sont pas symptomatiques d’un désir d’égalité et de progrès, elles sont le prélude à un avenir séparé et sont d’autant plus vives qu’elles sont mues à la fois par un laxisme juridique, une sous-capacité carcérale et le biais idéologique de certains magistrats qui pensent sincèrement que les lycéens de Mantes-la-Jolie qui avaient semé la terreur dans plusieurs lycées de la ville ont été victimes de torture et de violences aggravées pour le simple motif qu’ils avaient été obligés de s’agenouiller, mains sur la tête.
La rhétorique victimaire de cette chanteuse n’est que le énième exemple de la propagation du discours décolonial chez une certaine gauche et dans le monde de la transmission et de la culture. Elle révèle la normalisation du racialisme comme nec plus ultra de la pensée diversitaire et antiraciste. À ce titre, la référence à Assa Traoré et sa famille est éloquente. Plusieurs membres de sa famille ont été condamnés pour des actes de violences, des faits graves. Et l’association baptisée «comité vérité et justice pour Adama» qu’Assa Traoré préside a fait du «racisme d’État», de la «gestion coloniale des quartiers» et de la «violence policière comme instrument de répression des minorités», la question centrale de son activisme.
Le 27 novembre 2015, dans la cour des Invalides, avait lieu la cérémonie d’hommage aux victimes des attentats islamistes durant lequel trois chanteuses avaient entonné «Quand on n’a que l’amour». Parmi elles, Camélia Jordana. En faisant sien le discours décolonial et en reprenant mot pour mot la rhétorique victimaire et paranoïaque qui a participé au passage à l’acte terroriste, cette femme trahit l’hommage qu’elle avait rendu ce jour-là aux victimes.
» À voir aussi - Violences: la police abuse-t-elle?
lundi, mai 25, 2020
Le mur des Hydroxychlorocons - Le Billet de Sophia Aram
Sur la piste des “Super-Diffuseurs” européens de mésinformation sur le COVID-19 sur Twitter
Par Chine Labbé, Virginia Padovese, Marie Richter et Kendrick McDonald
Alors que le COVID-19 se répand dans le monde entier, NewsGuard traque les intox les plus populaires en ligne sur la pandémie, et recense les dizaines de sites qui publient ces fausses informations.
Aujourd’hui, nous présentons une nouvelle série de données qui s’intéresse non pas aux sites ou aux fausses allégations, mais aux comptes Twitter qui répètent, partagent et amplifient ces intox en France, en Italie et en Allemagne.
Cette liste s’intéresse aux comptes Twitter qui ont un grand nombre de followers — 20.000 ou plus — et qui ont partagé des liens relayant de fausses informations publiées par des sites que NewsGuard a évalué Rouges, c’est-à-dire généralement peu fiables, ou qui ont partagé d’autres fausses informations sur le COVID-19.
Principaux enseignements
Dans ce jeu de données, nous avons identifié 16 comptes Twitter qui constituent des “Supers Diffuseurs” de mésinformation sur le COVID-19. Cela signifie qu’ils ont de fortes audiences. Combinés, ces comptes atteignent environ 616.600 followers qui, évidemment, peuvent ensuite diffuser ces fausses informations via leurs propres comptes.
Chaque exemple de mésinformation sur le COVID-19 trouvé par NewsGuard a été publié après les efforts annoncés par Twitter le 18 mars pour lutter contre les intox sur le sujet. Ces “Supers Diffuseurs” ont donc pu continuer à diffuser de fausses informations sur la pandémie après cette date. Dans deux cas (un en France et un en Allemagne), il s’agit de comptes vérifiés par Twitter, ce qui signifie simplement que l’identité du propriétaire du compte a été confirmée, mais pourrait être interprété par certains utilisateurs comme une vérification par Twitter du compte et de ses contenus.
Dans de nombreux cas, ces comptes avaient déjà diffusé de fausses informations sur d’autres sujets. Par exemple, le compte Twitter du site allemand Compact-Magazin a relayé des théories du complot sur le 11 septembre; le compte Twitter du site italien ByoBlu.com a partagé des articles établissant à tort des liens entre les vaccins et l’autisme; et le compte Twitter du site français d’extrême droite Egalité Et Réconciliation a partagé de fausses informations sur la guerre civile en Syrie. Ces trois sites avaient déjà été évalués Rouges par NewsGuard, ce qui signifie que pour ceux ayant accès à l’extension de navigateur de NewsGuard, une icône rouge d’avertissement apparaissait aux côtés de ces intox sur le COVID-19, au moment où elles ont été postées.
Par le passé, Twitter a mis en avant ses efforts pour protéger les utilisateurs contre les contenus provenant de sites ayant violé ses conditions d’utilisation, notamment la publication d’allégations sur de faux remèdes contre le COVID-19. Le 11 mai, Twitter a aussi annoncé que la société ajouterait des labels et des messages d’avertissement sur certains tweets diffusant des informations trompeuses sur le virus.
Toutefois, ces efforts — qui n’ont pas été efficaces jusque-là, comme le montre la liste ci-dessous — sont par nature moins efficaces que le “pre-bunking” de sources peu fiables — c’est-à-dire la mise en garde des utilisateurs de la faible fiabilité de ces sources, en amont de la publication des intox. Le “pre-bunking” a permis à NewsGuard d’évaluer et d’analyser environ 95% de tous les articles d’actualité et d’information partagés sur Twitter dans les pays où NewsGuard opère.
Interrogé sur ces comptes et les fausses informations sur le COVID-19 qu’ils ont relayé, un porte-parole de Twitter n’a pas souhaité faire de commentaire.
Méthodologie et jeu de données
Pour être retenu comme “Supers Diffuseurs”, les comptes Twitter que nous avons inclus ici devaient remplir ces trois critères simples :
Avoir de larges audiences, avec plus de 20.000 followers sur Twitter.
Avoir publié ou partagé des contenus clairement faux sur le virus — soit l’un des 10 principaux mythes que nous avons déconstruits par le passé, soit une fausse allégation que nous avons traitée et démystifiée dans l’une de nos analyses de sites sur notre “Centre de Suivi de la mésinformation sur le Coronavirus”.
Être toujours actifs au 20 mai 2020. Twitter ne les avait donc pas retirés avant publication de nos données.
Nos analystes ont obtenu cette liste en partie en remontant la piste des comptes Twitter qui ont partagé les fausses allégations publiées sur les sites qui apparaissent sur notre Centre de Suivi de la mésinformation sur le Coronavirus. Nous avons ensuite complété cette liste en faisant davantage de recherches.
Cette liste est bien évidemment amenée à évoluer. Les comptes recensés ne sont peut-être pas les récidivistes les plus fréquents, ni les colporteurs d’intox sur le COVID-19 avec les plus larges audiences. Et les exemples donnés pour chaque compte ne constituent pas nécessairement une liste exhaustive de toutes les fois où ces comptes ont publié de la mésinformation sur le COVID-19.
Si vous connaissez un autre compte qui correspond à nos critères, merci de nous le signaler ici et notre équipe l’analysera.
Faites défiler la page vers le bas pour voir la liste des “Supers Diffuseurs” de mésinformation que nous avons identifiés à ce stade.
FRANCE
Nombre de comptes : 7
Nombre de tweets : 12
Nombre total de followers : 251.800
Alain Soral Officiel @AlainSoralOffic
60.900 Followers
Le compte Twitter de l’essayiste d’extrême droite Alain Soral, qui a été condamné à plusieurs reprises pour injures antisémites et négationnisme. Le compte, qui a été créé en 2012, partage souvent des liens vers des articles publiés sur EgaliteEtReconciliation.fr, un site créé par Alain Soral et évalué Rouge par NewsGuard, qui publie souvent de fausses informations et des théories du complot.
Exemples de posts trompeurs ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 5 mai avec un lien vers une vidéo YouTube publiée sur EgaliteEtReconciliation.fr dans laquelle Alain Soral affirme que le virus a été créé artificiellement et que la pandémie “a un intérêt déjà immédiat, c’est d’être le spot publicitaire de la vaccination mondiale que nous propose Monsieur Bill Gates”.
Tweet du 30 avril avec un lien vers un article publié sur EgaliteEtReconciliation.fr qui affirme que le virus a été créé “de toutes pièces” et “a fuité d’un laboratoire de recherches” avant de se propager “dans le monde entier, probablement du fait de Jeux mondiaux militaires”.
Tweet du 19 avril avec un lien vers un article publié sur EgaliteEtReconciliation.fr qui affirme que la Vitamine C peut “prévenir” le coronavirus. L’article renvoie vers de la vitamine C en vente sur le site de commerce en ligne de produits bios Au Bon Sens, qui appartient à une société détenue en majorité par Alain Soral.
Alain Soral n’a pas répondu à un message de NewsGuard envoyé via un formulaire de contact sur son site EgaliteEtReconciliation.fr cherchant à obtenir des commentaires sur les tweets ci-dessus.
TomLaRuffa, @TomLaRuffa
43.300 Followers
Le compte Twitter vérifié du catcheur professionnel français Tom La Ruffa, qui tweete en anglais et en français et partage des vidéos de catch et des commentaires sur l’actualité, notamment sur les effets présumés sur la santé de la technologie 5G.
Exemple de post trompeur ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 6 mai avec un lien vers un extrait vidéo du documentaire Plandemic, qui est truffé de fausses allégations sur la pandémie de coronavirus, notamment l’allégation selon laquelle le virus a été manipulé, ou encore celle selon laquelle le vaccin contre la grippe augmenterait les chances de l’attraper. Le tweet ajoute un commentaire ironique disant : “A part ça, les complots n’existent pas. Et le complexe pharmaco-médical ne veut que notre bien. Et les médias disent toujours la vérité”.
Interrogé sur ce tweet, Tom La Ruffa a déclaré à NewsGuard dans un message envoyé via Twitter : “Avec cette récente crise du Covid19, nous constatons régulièrement que les scientifiques se contredisent entre eux. Même l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) s’est trompée ces derniers mois dans plusieurs de ses analyses ou prédictions, notamment au début de cette pandémie, en sous estimant sa sévérité voire en retardant la divulgation de certaines informations à la communauté internationale”. Quand ce tweet a été publié, la vidéo Plandemic “était toujours disponible sur YouTube et approchait déjà à l’époque les 2 millions de vues”, a-t-il encore écrit, ajoutant : “Mon partage était donc totalement justifié”. (Note de l’Éditeur : Pour lire l’intégralité du message de réponse de Tom La Ruffa à NewsGuard, veuillez cliquer ici).
Pierre Jovanovic @pierrejovanovic
39.000 Followers
Le compte Twitter de l’auteur et blogueur Pierre Jovanovic, qui retweete principalement des actualités sur le gouvernement français, et a retweeté des articles provenant de sites jugés peu fiables par NewsGuard, comme EgaliteEtReconciliation.fr et TVLibertes.com.
Exemple de post trompeur ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 16 avril qui suggère que le co-fondateur de Microsoft, Bill Gates, pourrait être “le seul manipulateur de ce virus”, étant donné qu’il “veut moins de gens sur terre”. Le tweet inclut une photo d’un numéro de 1997 du magazine George dans lequel figure une interview de Bill Gates, et une citation qui lui est attribuée selon laquelle il aurait dit qu’une “planète surpeuplée” serait “étouffée jusqu’à l’extinction par un virus attaquant les poumons”. Toutefois, Snopes a montré que Bill Gates n’avait jamais dit ça.
Interrogé sur ce tweet, Pierre Jovanovic a écrit en anglais dans un email à NewsGuard qu’une “telle précision de la part de Monsieur Gates” était “incroyable”. Il a ajouté en français “Demandez donc à George Magazine parce que l’interview de Gates est dedans (…) Si le journaliste a choisi de mettre cette phrase en exergue c’est qu’il l’a estimé (sic) fidèle aux propos de Gates”. Puis il a demandé si NewsGuard avait une preuve que Bill Gates ait protesté contre ce passage lorsque l’article est paru, et remis en question la légitimité de l’article de Snopes.
Egalite Et Reconciliation @EetR_National
33.000 Followers
33.000 Followers
Le compte Twitter du site d’extrême droite EgaliteEtReconciliation.fr, évalué Rouge par NewsGuard. Ce site publie souvent de fausses allégations et des théories du complot, et son fondateur Alain Soral a été condamné à plusieurs reprises pour injures antisémites et négationnisme.
Exemples de posts trompeurs ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 29 avril avec un lien vers un article publié sur EgaliteEtReconciliation.fr qui affirme que le virus a été créé “de toutes pièces” et “a fuité d’un laboratoire de recherches” avant de se propager “dans le monde entier, probablement du fait de Jeux mondiaux militaires”.
Tweet du 19 avril avec un lien vers un article publié sur EgaliteEtReconciliation.fr qui affirme que la Vitamine C peut “prévenir” le coronavirus. L’article renvoie vers de la vitamine C en vente sur le site de commerce en ligne de produits bios Au Bon Sens, qui appartient à une société détenue en majorité par Alain Soral.
Tweet du 18 mars avec un lien vers un article publié sur EgaliteEtReconciliation.fr qui affirme que “le nouveau coronavirus trouve presque certainement son origine aux États-Unis, étant donné que ce pays est le seul à disposer de tous les cinq pathogènes types” trouvés dans le virus.
Alain Soral, le fondateur du site, n’a pas répondu à un message de NewsGuard envoyé via un formulaire de contact sur EgaliteEtReconciliation.fr, et demandant des commentaires sur les tweets ci-dessus.
L’info Libre @linfolibre
28.900 Followers
Un compte Twitter créé en 2017 qui se décrit comme le “média des résistances à la mondialisation malheureuse”.
Exemple de post trompeur ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 27 avril qui affirme à tort que le Prix Nobel japonais Honjo Tasuku a déclaré ne pas croire que le coronavirus était un virus naturel. Honjo Tasuku n’a en fait jamais tenu ces propos, comme l’a écrit CheckNews de Libération.
Ce compte Twitter ne peut pas recevoir de messages, et L’info Libre n’a pas répondu à un message Facebook de NewsGuard cherchant à obtenir un commentaire sur ce tweet. Un email fourni en ligne pour le site LinfoLibre.com, qui a le même logo que ce compte Twitter, n’a pas pu être délivré.
LeLibrePenseur @LLP_Le_Vrai
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Le compte Twitter du site conspirationniste LeLibrePenseur.org (évalué Rouge par NewsGuard) et du Youtubeur franco-algérien Salim Laïbi, qui est basé à Marseille, et se présente comme un “Chirurgien dentiste, lanceur d’alerte, éditeur et écrivain”. Ce compte, créé en 2011, a partagé de fausses informations sur d’autres sujets, notamment les vaccins.
Exemples de posts trompeurs ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 17 avril avec un lien vers un article publié sur LeLibrePenseur.org (repris sur un blog qui s’appelle Harvard To The Big House) qui affirme à tort que le virus est “bien artificiel puisqu’il a été conçu dans des laboratoires de haute technologie”.
Tweet du 17 avril avec un lien vers un article publié sur LeLibrePenseur.org sur les déclarations du Prix Nobel français Luc Montagnier selon lesquelles le coronavirus contient des insertions de VIH, ce qui suggère qu’il a été créé artificiellement. “Une chose est certaine, si une partie de l’ARN du Coronavirus contient un bout de VIH, l’affaire est déjà classée, l’origine de ce nouveau virus hyper contagieux est signée”, dit l’article.
Interrogé sur les tweets ci-dessus dans un message Twitter, @LLP_Le_Vrai n’a pas directement répondu aux questions de NewsGuard. Au lieu de cela, il a fourni un lien vers un autre article publié sur LeLibrePenseur.org, au sujet d’une interview du vice-président taïwanais Chen Chien-jen par France 24, dans laquelle il demande “une enquête scientifique” pour déterminer les origines du virus. Interrogé par le passé sur des posts publiés sur sa page Facebook, et sur ses pratiques éditoriales, le site avait refusé de répondre aux questions de NewsGuard.
Le compte Twitter d’un médecin généraliste basé à Poitiers, qui indique dans sa biographie croire “que chaque peuple a le droit à son identité”. “La diluer = vrai racisme”, ajoute ce texte. Ce compte a été créé en 2013.
Exemple de post trompeur ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 18 avril avec un lien vers un article provenant du site anti-islam RiposteLaique.com (évalué Rouge par NewsGuard), qui affirme à tort que le virus est “originaire d’un labo MILITAIRE américain” et qu’“il est bien une arme de destruction biologique”.
Dans un message Twitter envoyé à NewsGuard, @Reveident a écrit : “Ce qui m’a paru évident dès le départ de cette épidémie, c’est l’invraisemblance d’une mutation spontanée d’un virus dont l’épicentre était une ville qui, comme par hasard, a un laboratoire de recherche de niveau mondial sur les virus. Après, je pense qu’il s’agit d’une fuite accidentelle depuis le laboratoire. Je trouve toujours utile de ne négliger aucune piste et de lire des avis autres que les miens (…) Rappelez-vous que la fake boobs d’aujourd’hui peut être la vraie de demain”.
Le compte Twitter d’Alessandro Meluzzi, qui se décrit dans sa biographie sur Twitter comme un “psychiatre, psychologue, psychothérapeute, criminologue. Professeur de psychiatrie médico-légale. Primat de l’Ancienne Église Orthodoxe Autocéphale Orientale Italienne”. Alessandro Meluzzi est un ex-député, membre du parti de centre droit Forza Italia.
Exemples de posts trompeurs ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 16 avril avec un lien vers une vidéo de la chaîne YouTube Radio Radio Tv, qui contient un extrait d’un entretien avec le scientifique américain Shiva Ayyadurai, qui, d’après le tweet, “explique tout sur ce que l’Etat profond essaie de cacher sur le Coronavirus”. Shiva Ayyadurai affirme que certaines personnes et institutions, parmi lesquelles Hillary Clinton, Mark Zuckerberg, la Fondation Bill et Melinda Gates, et les Nations Unies, “veulent faire se propager la peur du Coronavirus”, qui a été “créé par l’Etat profond”. Shiva Ayyadurai a aussi suggéré que la solution contre la pandémie de COVID-19 était un régime strict de vitamine A, de vitamine D, de vitamine C et d’iode. “La solution est de s’exposer au soleil, et si vous ne pouvez pas le faire, prenez des suppléments de vitamine D”, a-t-il dit. Il a aussi tenu le scientifique américain Anthony Fauci comme responsable de la pandémie, l’appelant “le visage de Big Pharma”.
Tweet du 9 mai avec un lien vers le documentaire Plandemic, qui s’appuie sur une interview de l’activiste anti-vaccins Judy Mikovits, et qui est truffé de fausses allégations sur la pandémie de coronavirus. En référence aux chercheurs travaillant sur un vaccin, Judy Mikovits déclare : “Ils vont tuer des millions de personnes, comme ils l’ont déjà fait avec leurs vaccins”.
Interrogé sur les tweets ci-dessus, le ou la secrétaire d’Alessandro Meluzzi a écrit dans un email à NewsGuard : “Alessandro Meluzzi a estimé que les contenus de ces tweets pouvaient fournir d’intéressants sujets de débat”.
Le compte Twitter du site italien ByoBlu.com, qui est détenu et géré par le bloggeur Claudio Messora. Ce site a été évalué Rouge par NewsGuard et a publié des allégations fausses et sans fondement sur la santé.
Exemples de posts trompeurs ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 19 mars avec un lien vers une interview vidéo du chercheur italien Stefano Montanari publiée sur ByoBlu.com, qui dit, au sujet du COVID-19, que “les personnes en bonne santé ne souffrent aucunement de ce virus” et que “le taux de mortalité du virus est très faible, voire inexistant”.
Tweet du 12 mai avec un lien vers une interview vidéo du chercheur italien Stefano Montanari publiée sur ByoBlu.com, qui déclare que le “Coronavirus est une intox. Si on s’en était occupé correctement, personne ne l’aurait remarqué”. Dans la vidéo, Stefano Montanari suggère également l’injection de vitamine C en intraveineuse et l’utilisation d’ozone pour combattre le COVID-19.
ByoBlu.com n’a pas répondu à un message de NewsGuard envoyé via un formulaire de contact sur le site, et cherchant à obtenir un commentaire sur les tweets ci-dessus.
Le compte Twitter de Patrizia Rametta, qui a été coordinatrice régionale du parti de droite La Ligue en Sicile.
Exemple de post trompeur ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 10 mai avec un lien vers une vidéo YouTube. Patrizia Rametta, qui cite le contenu de cette vidéo, écrit dans son tweet : “Bill Gates détient le brevet du Coronavirus depuis avant la pandémie. QUELQU’UN A DES DOUTES? Bien que ce soit un virus faible, vous avez besoin d’un vaccin pour un virus qui peut être tué à 18 degrés celsius. Nous avons connu le confinement. POURQUOI? QUELQU’UN PEUT L’EXPLIQUER?
Ce compte Twitter ne peut pas recevoir de messages, et Patrizia Rametta n’a pas répondu à un message Facebook de NewsGuard cherchant à obtenir un commentaire sur le tweet ci-dessus.
Le compte Twitter du journaliste italien Cesare Sacchetti, qui détient et gère le site LaCrunaDellAgo.net (Le chas de l’aiguille).
Exemples de posts trompeurs ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 23 avril avec un lien vers un article de Cesare Sacchetti publié sur son site LaCrunaDellAgo.net. Le tweet dit : “Les emails piratés par des pirates américains confirmeraient des faits très sérieux. Le coronavirus aurait été modifié dans un laboratoire avec le VIH, dans le but de le propager intentionnellement. Tout cela pour atteindre un objectif : (l’utilisation de) la micropuce de Bill Gates et Rockfeller”.
Tweet du 4 mai avec un lien vers un article publié sur LaCrunaDellAgo.net. Le tweet dit : “En mars 2019, l’UE a officiellement parlé de pandémie. Ils avaient décidé de faire un vaccin contre un virus qui n’était même pas là! Ils voulaient aussi le vaccin numérique de Bill Gates et Rockefeller. Ils voulaient nous emmener vers le Nouvel Ordre Mondial. Ils l’ont fait avec le Covid”.
Tweet du 5 mai qui déclare : “Bill Gates : ‘La chose la plus urgente dans le monde en ce moment est un vaccin contre le Covid-19’. Les enfants africains qui ont reçu les vaccins de Bill Gates sont soit morts, soit devenus épileptiques. Les vaccins de Bill Gates sont plus dangereux que tout coronavirus”.
Interrogé sur ces fausses allégations, Cesare Sacchetti a déclaré à NewsGuard dans un message Twitter : “Dans les articles publiés sur mon site, il y a des liens vers les sources qui attestent de ce qui y est écrit. Ces tweets font précisément référence à ces articles dans lesquels les actualités et les faits sont rapportés avec leurs sources”.
Au sujet du tweet du 23 avril, Cesare Sacchetti a dit : “Pour information, un Prix Nobel, (Luc) Montagnier, et d’autres scientifiques, ont aussi déclaré que le virus avait été créé en laboratoire”.
Au sujet du tweet du 4 mai, Cesare Sacchetti a déclaré : “Le vaccin numérique existe, et il a déjà été administré au Texas. Je ne comprends pas très bien ce que vous contestez au sujet de ce tweet”.
Au sujet du tweet du 5 mai dans lequel il disait que “les enfants africains qui ont reçu les vaccins de Bill Gates sont soit morts, soit devenus épileptiques”, Cesare Sacchetti a dit : “Si vous voulez la source des dégâts causés par les vaccins en Afrique, je vous recommande cette étude”. Il a fourni un lien vers une étude sur les effets de l’introduction du vaccin DTP (contre la diphtérie et le tétanos) et du vaccin antipoliomyélitique oral dans une communauté urbaine de Guinée-Bissau au début des années 1980.
Le compte Twitter d’Elio Lannutti, député du Mouvement 5 étoiles.
Exemple de post trompeur ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 19 mars avec un lien vers un article publié sur le site Debuglies.com. Ce tweet relaie la fausse allégation selon laquelle la vitamine C peut guérir le COVID-19, en déclarant : “Coronavirus COVID-19 : la vitamine C en intraveineuse peut aider à guérir la pneumonie et prévenir la réplication virale”.
Elio Lannutti n’a pas répondu à un email de NewsGuard cherchant à obtenir un commentaire sur ce tweet.
Le compte Twitter associé au site RT Deutsch, un média de propagande et de désinformation russe autrefois connu sous le nom de Russia Today, et évalué Rouge par NewsGuard. Ce compte (vérifié) a été créé en juin 2014.
Exemple de post trompeur ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 24 mars avec un lien vers un article publié sur Deutsch.RT.com, qui suggère à tort que la pandémie de COVID-19 a été prédite lors d’une simulation.
Interrogé sur cette fausse allégation sur le COVID-19, un représentant de RT Deutsch, Sebastian Range, a déclaré à NewsGuard dans un email : “Comme vous l’avez justement noté, il s’agit d’une interview. Cette déclaration représente l’opinion personnelle de M. König (…), et non pas celle de notre chaîne. Une telle distinction devrait être évidente d’un point de vue journalistique”.
Le compte Twitter associé au site KenFM.de, qui est géré par le journaliste et activiste allemand Ken Jebsen. Ce compte a été créé en mars 2014.
Exemple de post trompeur ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 4 mai avec un lien vers un article publié sur KenFM.de qui relaie une déclaration vidéo de Ken Jebsen. Celle-ci comprend de nombreuses allégations fausses ou trompeuses sur le coronavirus, et des spéculations conspirationnistes sur la Fondation Bill et Melinda Gates, notamment le fait que le couple aurait “acheté” l’OMS “parce que la Fondation Bill et Melinda Gates fournit plus de 80% du financement de l’Organisation Mondiale de la Santé”. (Correctiv, une rédaction à but non lucratif spécialisée dans les enquêtes, a montré que la Fondation Bill et Melinda Gates fournissait en fait 11.41 % du financement de l’OMS). La vidéo affirme également à tort que la chancelière allemande Angela Merkel a l’intention de “secrètement” mettre en place une “vaccination obligatoire” contre le coronavirus, et que le virus est “une forme de grippe relativement inoffensive”. Correctiv a également tordu le cou à ces deux allégations.
Un email de NewsGuard envoyé à KenFM.de, et cherchant à obtenir un commentaire sur ces fausses allégations sur le COVID-19, est resté sans réponse.
Le compte Twitter associé au site Compact, le site d’un mensuel allemand qui fait avancer les points de vue du parti de droite AfD, relaie de la désinformation russe, et a été évalué Rouge par NewsGuard. Créé en mars 2014, ce compte poste surtout des articles de Compact-Online.de.
Exemple de post trompeur ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 20 avril avec un lien vers un article de Compact-Online qui reprend la fausse affirmation selon laquelle le nouveau coronavirus aurait été créé dans un laboratoire américain comme arme biologique.
Un email de NewsGuard envoyé à Compact-Online et cherchant à obtenir un commentaire sur cette fausse allégation sur le COVID-19 est resté sans réponse.
Un compte pro-Russie et pro-Trump qui partage fréquemment des articles, des vidéos et des photos sur des théories du complot, notamment la conspiration QAnon et “Obamagate”, une théorie mise en avant par Donald Trump, le président des Etats-Unis, et ses soutiens, et relative à des allégations sur des méfaits non spécifiés qui auraient été commis par l’administration Obama. Ce compte a été créé en avril 2014.
Exemples de posts trompeurs ou faux sur le COVID-19 :
Tweet du 13 mai avec un lien vers le site conspirationniste de droite Watergate.tv, qui contient la fausse allégation selon laquelle le nouveau coronavirus est “aussi inoffensif que la grippe saisonnière moyenne”, ainsi que des spéculations selon lesquelles Bill Gates serait en train de fomenter un complot pour mettre en place une politique mortelle et obligatoire de vaccination contre le coronavirus.
Tweet du 8 mai avec un lien vers un extrait vidéo du documentaire Plandemic, qui est truffé de fausses affirmations sur la pandémie de coronavirus. Cet extrait vidéo a été retiré de YouTube.
NewsGuard n’a pas pu confirmer l’identité du propriétaire de ce compte, et n’a pas pu lui envoyer de message pour lui demander un commentaire puisque ce compte n’accepte pas les messages.
jeudi, mai 21, 2020
La connerie rend les oreilles molles - La drôle d'humeur de Gérémy Créde...
Dans une lettre lue, le comédien Vincent Lindon est revenu de façon critique sur les trois années de présidence Macron et la gestion de la crise sanitaire. Notre contributeur Aldo Sicurani lui répond.
L'acteur Vincent Lindon, au Festival de Cannes en 2018. (Arthur Mola/AP/Sipa)
Par
Aldo Sicurani
(délégué général d’une fédération d’investisseurs)
Publié le 12 mai 2020 à 14h27
Cher Monsieur Lindon,
Vous êtes beau comme l'Antique, mais votre texte est pauvre. Sur la morale d'abord. Les politiques sont pourris et animés de l'esprit de caste ? Admettons. Mais vous y avez cédé aussi dans une tribune (2002) demandant que l'on passe l'éponge sur la fraude fiscale de Françoise Sagan au prétexte qu'elle a contribué au rayonnement de la France. Un argument que Carlos Ghosn pourrait trouver bien utile. Les obscurs qui paient des impôts apprécieront. Je remarque au passage qu'en matière d'esprit de caste, de népotisme et de fraude fiscale, votre profession n'a pas de leçons à donner.
Quant au fond, il est teinté de la mauvaise foi nécessaire à la réussite de l'exercice. Sur les dépenses de santé d'abord. Après vérification, je constate que le président Macron a respecté les promesses du candidat, contrairement à vos affirmations. Comme l'Allemagne, la France consacre bon an mal an 11 % de son PIB à la santé. Je remarque au passage, qu'un habitant de « ce pays si riche » a une espérance de vie de près de deux ans supérieure à celle d'un Allemand et qu'il souffre d'un nombre moins élevé de pathologies graves. Donc, avoir moins de lits en réanimation ne me semble pas relever d'une politique sanitaire absurde. Mais le fond du problème est une organisation inadaptée et non un manque de moyens. C'est ce que ce gouvernement cherche depuis trois ans à réformer avec les résistances que l'on sait.
Justice et police françaises
Sur la justice, on croit rêver : procédure rapide de moins de 12 mois, appel et cassation inclus. Maître Lindon, vous êtes trop timide. Vous me décevez. Simplifions, simplifions : jury populaire souverain, jugement sans appel, pas de Cassation, ses magistrats étant tous pourris comme l'élite dont ils font partie et pencheront toujours du côté du pouvoir qu'il soit d'extrême gauche (procès staliniens ou chavistes) comme d'extrême droite (procès nazis).
« La prison c'est pour les autres », prétendez-vous. Messieurs Carignon, Medecin, Tapie, Mouillot, Cahuzac, Boucheron, Pradille ou Balkani auraient aimé. Vous auriez pu signer une tribune demandant la relaxe de M. Balkani au motif des inestimables services qu'il a rendus à sa bonne ville de Levallois-Perret (Hauts-de-Seine). Nul doute que vous l'auriez fait, bonne âme que vous êtes, si on vous l'avait demandé. Heureusement, vous n'en avez pas eu besoin.
Ce bon peuple de Levallois, ce peuple souverain si savant et si juste, s'est chargé de les réélire, lui et son admirable épouse à chaque fois qu'ils se sont présentés à ses suffrages même après condamnation. Il a fallu que cette justice française, si mal faite, obtienne (on se sait par quels moyens douteux) la levée de son immunité parlementaire (ses complices devaient dormir) pour enfin nous débarrasser de ce triste sire.
Venons-en à ces violences policières qui vous sont si chères. Je ne les nie pas et je les réprouve. Quand elles sont avérées, elles doivent être sanctionnées. Cela dit, je serai toujours du côté de la police. C'est le bon sens même qui l'exige. Les manifestations des « gilets jaunes » m'y obligent. Il y a eu sans doute des gens sincères et respectueux de l'ordre public parmi eux. Mais le refus de tout ordre, de toute autorité en leur sein a été à l'origine d'une effroyable pagaille et finalement de leur échec. C'est malhonnête de tout mettre sur le dos des casseurs et du gouvernement.
Réforme des retraites
Autre malhonnêteté, Monsieur Vincent, la réforme des retraites. Elle était clairement annoncée dans le programme du candidat et a fait l'objet de deux ans de consultations approfondies. Soyez content, la Covid-19 aura probablement eu sa peau. Mais il y a des faits auxquels nous ne pouvons pas échapper. En 1950, 8 actifs payaient la retraite de 1 retraité pendant 5 ans. En 2019, 1,58 actif paye la retraite de 1 retraité pendant 18 ans. Qui paiera ? Entreprises et salariés paient déjà beaucoup. Nos enfants ?
Sans les Blackrock, sur lesquels ils crachent avec tant de jouissance, les 'GJ' peuvent dire adieu à leurs retraites et accessoirement à leurs services publics.
Aujourd'hui, ce sont nos déficits qui paient nos retraites. Pas un budget à l'équilibre depuis 1974 ! Et ces déficits, qui financent votre statut d'intermittent, ce sont des investisseurs (essentiellement étrangers) qui les comblent. Sans les Blackrock, sur lesquels ils crachent avec tant de jouissance, les « GJ » peuvent dire adieu à leurs retraites et accessoirement à leurs services publics. Pour combattre les effets du coronavirus, la France lance un plan de 100 milliards. L'Allemagne de 1.000 milliards ! Cette différence, c'est le prix de notre insouciance et de l'inconséquence de ce « pays si riche ». C'est peut-être la question fondamentale que vous auriez dû vous poser plutôt que de crier avec les loups. Ces loups qui, si nous n'y prenons pas garde, nous gouverneront demain.
Aldo Sicurani est le délégué général d'une fédération d'investisseurs.
Pour le journaliste britannique John Lichfield, si l’on peut reprocher au gouvernement français quelques loupés dans la gestion de la crise liée au coronavirus, le bilan n’est pas si noir que ça.
En français, il existe un mot bien pratique, que l’on croise souvent dans les albums d’Astérix : la zizanie*, qui définit un désaccord ou une dispute générale, une querelle où tout le monde s’enguirlande. Il n’est pas étonnant que les Français aient inventé ce mot. En France, le travail d’équipe n’est pas un réflexe naturel. Pas plus que l’union nationale.
Pourtant, la France était entrée dans le confinement lié au Covid-19 avec un calme relatif. C’est le retour progressif à une vie normale tel qu’il est proposé par le gouvernement à compter du 11 mai qui a “semé la zizanie*” – autrement dit, qui a incité tout le monde à se mettre à crier en même temps, faisant passer des inquiétudes compréhensibles ou des calculs politiques mesquins avant l’intérêt général en temps de crise.
Une communication qui patauge
La faute en revient en partie au gouvernement d’Emmanuel Macron et Édouard Philippe. Sa campagne de communication, plutôt adéquate au début de l’épidémie, patauge depuis quelques jours. Or, les partis d’opposition, de l’extrême droite au centre droit et à la gauche, ont une tendance à jouer les mouches du coche en s’improvisant épidémiologistes, ce qui a quelque chose de profondément déplaisant.
Sans parler de l’attitude déprimante de certains salariés du métro et des chemins de fer et de certains enseignants (pas tous, certes), qui, récalcitrants, menacent de ne pas reprendre leurs postes [à partir du 11 mai]. Où serait la France si les médecins, le personnel soignant et des maisons de retraite, les employés des entrepôts et des supermarchés, les éboueurs, les chauffeurs routiers – et ces enseignants qui n’ont jamais cessé de faire cours – avaient refusé de prendre le risque de sortir de chez eux ces deux derniers mois ?
La chambre haute du Parlement, le Sénat, qui s’était montré hostile au confinement du 17 mars, a voté de justesse contre l’assouplissement progressif de ce même confinement à partir du 11 mai. Ou plutôt, la majorité du principal parti au Sénat, les Républicains (LR), de centre droit, n’a pas su exprimer son opinion sur la question la plus importante à laquelle est confrontée la nation. Ils se sont abstenus. Quel courage* !
Même si cela s’est joué à peu de chose, ce sont les votes du centre gauche et de l’extrême gauche qui ont abouti au rejet du projet du gouvernement, qui prévoit de mettre en place un déconfinement à deux vitesses en divisant le pays entre les départements “verts” (où l’épidémie reste faible) et “rouges” (où le virus est actif). Sur le plan pratique, ce vote a un effet pour ainsi dire nul. Le débat sénatorial était purement symbolique. Le projet avait déjà été approuvé par la chambre basse, l’Assemblée nationale. Son effet, s’il est également symbolique, a été plus grave. Le refus du Sénat a accru le sentiment grandissant de confusion et de défiance vis-à-vis du gouvernement français, un sentiment selon moi injustifié et dangereux.
Une lassitude croissante
Au début, Macron et Philippe ont pu compter sur un large soutien de la population, mais c’est fini. [Dans un récent sondage], 65 % des personnes interrogées disent douter que le gouvernement puisse permettre au pays de sortir efficacement de la crise du Covid-19. Dans le même temps, il est évident que le confinement suscite une lassitude croissante. Routes et rues recommencent à bruire d’activité. Les gens craignent de quitter le sanctuaire de leur foyer. Mais ils tiennent aussi à reprendre le cours de leur vie.
L’économie française a été placée en coma artificiel pendant [huit] semaines. Une situation qui ne saurait perdurer, sous peine de détruire des dizaines de milliers d’emplois et de paralyser le pays pendant des années. Beaucoup d’enfants, souvent ceux qui ont des difficultés en classe, ne se sont pas connectés aux cours en ligne, qui, en dehors de cela, ont connu un franc succès.
Des succès, tout de même
Dans son discours au Sénat, le Premier ministre Édouard Philippe a évoqué sans détour et en détail ces risques concurrents et ces choix dangereux. De mon point de vue, bien qu’il soit fréquemment l’objet des railleries des commentateurs français, Philippe a été un modèle de calme et de bon sens pendant la crise du Covid.
Impressionnants, les résultats du gouvernement français ? Non, pas dans tous les domaines. Il a fait preuve d’une lenteur coupable quand il s’est agi de comprendre à quel point il était important de procéder à des tests. Il y a quelques semaines, il ne s’est pas montré des plus francs quant à la pénurie de masques – un problème aujourd’hui réglé.
Mais prenons également en compte ses succès (ce dont semblent absolument incapables les politiciens de l’opposition et une grande partie des médias du pays). La France devrait atteindre un total définitif d’environ 40 000 morts (soit à peu près autant que les victimes d’une grande épidémie de grippe en 1969). Sans le confinement, on aurait pu recenser 60 000 morts de plus. Le système hospitalier français a tremblé, mais il n’a jamais été submergé. Les chiffres des décès liés au Covid, annoncés chaque soir, sont aussi exhaustifs et honnêtes que possible, à en juger par les statistiques officielles sur “l’ensemble des décès”. Le programme d’aide économique aux entreprises et aux personnes, immédiatement mis en œuvre à la mi-mars, est le plus généreux au monde.
Seront-ils remerciés ?
Sur le moment, rares sont les commentateurs et les politiciens de gauche qui ont salué cette réaction. Et maintenant, certains, apparemment, considèrent que ces mesures font partie des “acquis sociaux*”, et qu’elles devraient être maintenues indéfiniment. La mortalité est importante en France, comparée à l’Allemagne, ou au Portugal et à la Hongrie, et elle obsède les médias et l’opposition, ce qui peut se comprendre.
C’est vrai, les plans de “déconfinement*” du gouvernement sont complexes et ils prêtent à confusion. Mais le virus aussi. Espérons que Philippe et Macron aient élaboré leur projet avec à peu près autant d’efficacité que celle dont ils ont fait preuve depuis la mi-mars, non sans quelques hésitations, quelques hoquets et échecs au départ.
S’ils se sont trompés, bien des voix se feront entendre pour le leur reprocher. Si la France redevient lentement elle-même, sans une seconde vague épidémique, c’est à eux qu’en reviendra l’immense mérite.
En seront-ils remerciés pour autant ? Sûrement pas.
On a les dirigeants qu’on mérite et les élites qu’on peut. En ces temps de coronavirus où le politique a cédé la place à des comités scientifiques pour décider de l’ouverture des salons de coiffure et du nombre d’occupants dans un ascenseur, les élites intellectuelles, elles, n’ont plus qu’à s’incliner devant le surgissement fécond d’une nouvelle intelligentsia : le penseur-people radical.
Ancien ministre, ancien animateur de télé, ayant parcouru en avion des centaines de milliers de kilomètres pour nous présenter la beauté du monde et les désastres du réchauffement climatique, Nicolas Hulot, inspirateur de la célèbre marque de shampooing Ushuaia, est notre leader vert national. Il traîne sa gueule de baroudeur burinée, sa mélancolie d’humaniste déçu et ses fulgurances idéalistes, de plateaux télé en ministère depuis quarante ans. On l’aime comme un particularisme national, avec ses paradoxes et ses ridicules (qui n’en a pas dans notre classe médiatico-politique ?), ses faiblesses et ses atermoiements, son déchirement perpétuel entre éthique de conviction et éthique de responsabilité.
L’homme aux six voitures a écrit un manifeste de cent propositions. La première : « Le temps est venu, ensemble, de poser les premières pierres d’un monde nouveau ». La dernière : « Le temps est venu de créer un lobby des consciences ». (Qui œuvrera dans l’ombre pour contraindre et mettre au pas les consciences récalcitrantes ???) Nicolas Hulot y prône la sobriété, rappelle que « la vie ne tient qu’à un fil » et explique que le temps est venu de se « réapproprier le bonheur » et de « transcender la peur en espoir ». Signe des temps, ce manifeste est publié en Une du quotidien Le Monde, journal qui, à une autre époque, aurait sûrement ri de bon cœur à la lecture de cette longue litanie pleine de bons sentiments. Mais certains médias sont plus prompts que d’autres à percevoir l’irruption du monde nouveau. Or, le monde nouveau arrive et il faut vraiment être demeuré pour ne pas l’avoir compris. Le bonheur est une idée neuve en Europe, disait Saint-Just, membre du Comité de salut public, en 1794 : il voulait en imposer sa vision au peuple, de gré ou de force.
« En 2020, les bobos et les prolos n’ont toujours pas la même grille de lecture : prôner la décroissance est plus facile de sa villa du Cap Ferret que de la France périphérique où l’on a du mal à joindre les deux bouts. »
Le cru 2020 du bonheur est arrivé. Nicolas Hulot est son prophète et Marion Cotillard sa pythie. (L’actrice oscarisée n’avait-elle pas compris avant tout le monde qu’« on nous ment sur beaucoup de sujets », dont la mort de Coluche, le 11 septembre et l’homme sur la lune ?) Des personnalités de premier plan comme Sibeth Ndiaye ont immédiatement saisi la portée révolutionnaire du projet de Nicolas Hulot. La porte-parole du gouvernement a salué sur son compte Twitter cette « vision qui dessine un horizon commun » dont la 9e proposition est, précisons-le : « Le temps est venu de ne plus se mentir ». Il est vrai qu’elle sait de quoi elle parle.
En proposition 71, le manifeste propose de nous libérer de nos addictions consuméristes. Mais consommer librement reste encore le rêve de la majorité des exclus. Les « gilets jaunes » étaient furieux qu’on taxe leur consommation de gazole. Ils rêvaient de payer des vacances et des iPhone à leurs enfants. Et même, pardi, de bonnes études parce que ça coûte. La consommation n’est pas que le symbole du mal. Comme le rappelait Raymond Aron en 1969, la majorité des Français souffre non pas de la société de consommation mais de ne pas accéder aux biens que produit cette société de consommation. En 2020, les bobos et les prolos n’ont toujours pas la même grille de lecture : prôner la décroissance est plus facile de sa villa du Cap Ferret que de la France périphérique où l’on a du mal à joindre les deux bouts.
Dans la même édition du Monde, décidément au taquet !, on peut lire le remarquable « Non à un retour à la normale », signé par 200 artistes et scientifiques, parmi lesquels Juliette Binoche, Madonna, Robert de Niro, Cate Blanchett, Vanessa Paradis, Bob Wilson, Joaquin Phoenix, Muhammad Yunus, prix Nobel de la paix, et bien sûr Nicolas Hulot et Marion Cotillard. « La catastrophe écologique en cours relève d’une “méta-crise”, peut-on lire. L’extinction massive de la vie sur terre ne fait plus de doute et tous les indicateurs annoncent une menace existentielle directe. À la différence d’une pandémie, aussi grave soit-elle, il s’agit d’un effondrement global. » Bigre. « La transformation radicale qui s’impose – à tous les niveaux – exige audace et courage, poursuit le texte. À quand les actes ? » Cette tribune, qui ne brasse prudemment que des généralités, recueille l’assentiment quasi général de tout le show-biz, inquiet que « la pollution, le réchauffement et la destruction des espaces naturels mènent le monde à un point de rupture. »
« Le temps n’est pas à l’exactitude et à l’esprit critique des Lumières, le temps est (re)venu de croire au grand soir, à l’élan effréné pour ouvrir de nouvelles voies. »
Peu importe si notre pandémie est due à l’infection du pangolin par la chauve-souris, pangolin lui-même consommé par les Chinois selon une bonne vieille coutume ancestrale qui, pour l’espèce, n’a pas grand-chose à voir avec le réchauffement climatique. Le temps n’est pas à l’exactitude et à l’esprit critique des Lumières, le temps est (re)venu de croire au grand soir, à l’élan effréné pour ouvrir de nouvelles voies. Juliette Binoche, tête d’affiche de cette tribune, veut en finir avec l’affreux monde d’avant. Elle a dénoncé sur les réseaux sociaux les odieux agissements du gouvernement qui veut nous tracker. « Ce sont des opérations organisées par des groupes financiers internationaux (principalement américains) depuis longtemps. Ils manipulent (sans être parano) : les vaccins qu’ils préparent en font partie : mettre une puce sous-cutanée pour tous c’est NON. NON aux opérations de Bill Gates » [sic]. No comment.
Le César du meilleur acteur penseur-people radical revient cependant à Vincent Lindon. Dans un long texte qu’il égrène face caméra pour le site Médiapart, le comédien étrille le quinquennat d’Emmanuel Macron : goût du président pour la pompe monarchique, affaire Benalla, crise des « gilets jaunes », réforme des retraites, gestion de la crise du coronavirus… La totale. Un véritable pastiche d’Edwy Plenel comme s’en est amusée Catherine Nay sur l’antenne d’Europe 1. Vincent Lindon néanmoins propose du concret. La taxe Jean Valjean. Dont l’objectif est de taxer la fortune des riches au-dessus de 10 millions. Avec un barème qui s’échelonne entre 1 et 5 % selon le niveau de richesse. Pourquoi un seuil de dix millions ? De très mauvaises langues sur les réseaux sociaux prétendent qu’un tel seuil mettrait à l’abri la grande majorité du showbiz prêt à soutenir l’initiative sans en subir les conséquences. Ignoble diffamation. Pourquoi Jean Valjean ? Parce qu’il serait le symbole de la redistribution ? Le précurseur d’une vision moderne née au XIXe siècle de l’État providence soucieux de la détresse des plus vulnérables ? C’est vrai de Victor Hugo, bataillant à l’Assemblée contre le travail des enfants, pour l’école laïque, prononçant son célèbre Discours sur la misère.
« Ce qui caractérise Jean Valjean c’est sa conduite. La mise en conformité de ses actes et de sa révolte. Il ne parle pas, il ne fait pas de beaux discours, il agit. Le penseur-people radical donneur de leçons est-il prêt à donner autant de sa poche que Jean Valjean ? »
Jean Valjean, héros des Misérables, bien au contraire, n’attend rien de l’État et ne lui demande rien. Il n’exige pas, indigné, qu’on taxe les riches : il se taxe lui-même. L’ancien bagnard s’enrichit honnêtement, ouvre une fabrique de verroterie, construit un dispensaire, une école, secoure les nécessiteux, deviendra le bienfaiteur de la ville de Montreuil-sur-Mer et finalement son maire. Ce qui caractérise Jean Valjean c’est sa conduite. La mise en conformité de ses actes et de sa révolte. Il ne parle pas, il ne fait pas de beaux discours, il agit. Le penseur-people radical donneur de leçons est-il prêt à donner autant de sa poche que Jean Valjean ?
Parmi les artistes et les célébrités, certains sont des exemples. Ils font beaucoup et en parlent peu, voire pas du tout. On les applaudit. Certains font peu et en parlent beaucoup. C’est mieux que rien. D’autres sont des révoltés professionnels qui s’indignent que le système soit pourri et que l’État ne fasse rien, car c’est à lui et à lui seul de faire. Triste tropisme français. Toujours tout attendre de l’État. Surtout quand ça nous arrange ?
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